Glitch Tank

Le développeur indépendant Michael Brough semble avoir développé une obsession pour les jeux de stratégie innovants à l’image de son célèbre Vertex Dispenser disponible sur Steam. C’est lors d’une compétition TIGSource que ce concepteur fou a produit Exuberant Struggle, l’ancêtre de son dernier né appelé Glitch Tank : un jeu de stratégie 1v1, sur Ipad, entre board games et bornes d’arcade 80s.

Glitch me baby

Au lancement du jeu, quelques informations textuelles concernant l’objectif et les contrôles sont données par de larges pixels type premiers jeux DOS. Un second écran indiquant la position des joueurs semblent souffrir d’un bug d’affichage les rendant régulièrement illisibles…

Le menu de Glitch Tank fait partie de ces interfaces qui annoncent tout de suite la couleur. Ici, l’ambiance est aux pixels buggés et bugs pixélisés. Le concept est relativement simple, en vue du dessus, chaque joueur contrôle un tank, l’objectif étant de détruire le tank ennemi. Pour ce faire, le joueur doit remplir l’écran de mini-tanks, de mines, d’explosions, d’erreurs et de glitchs, en évitant d’être touché et de provoquer un blocage du système à la manière du tilt d’un flipper un peu trop bousculé.

Les bugs parasitant un écran de jeu commun aux deux joueurs, on s’attendrait à ce que les adversaires tentent de les éviter au maximum. Mais le jeu pousse par son système et son esthétique à tout faire dérailler : une véritable invitation à foutre le bordel.

Un véritable jeu de stratégie

Glitch Tank est avant tout un véritable jeu de stratégie en PvP ou PvAI, au gameplay symétrique, que l’on peut trouver dans la section board games de l’AppStore. Rien d’étonnant, puisque le système de contrôle du tank repose sur le principe des cartes d’action de beaucoup de jeu de plateau. A chaque tour, le joueur peut choisir parmi quatre actions proposées en bas de l’écran. Lorsqu’une action est sélectionnée, elle s’effectue et est automatiquement et aléatoirement remplacée par l’une des huit actions disponibles. Quatre de ces huit features sont de simples déplacements: tourner à droite, à gauche, avancer ou reculer d’une case. Les quatre autres sont plus offensives: tirer, effectuer un dash endommageant les tanks ennemis et permettant de passer sur une mine sans la faire exploser, déposer une mine derrière soi ou produire un mini-tank. Cette dernière mécanique alimente fortement la montée en complexité du jeu.

En effet, lorsqu’un minitank est créé, il effectue les mêmes actions que l’avatar. Il est ainsi possible de blesser l’adversaire par l’action de ces pions. Ce contrôle simultané des éléments de jeu et le friendly fire obligent rapidement les joueurs à établir de véritables stratégies complexes pour ne pas bêtement se faire tuer par ses propres actions. Cet aspect stratégique est encore plus présent en tour par tour, l’un des deux modes proposés. Le second, en temps réel, propose une expérience plus tactique et nerveuse que la première, avec la possibilité de faire tilter le système lorsque trop d’actions sont effectuées rapidement. Le gameplay de Glitch Tank est finalement un pur produit de Michael Brough : des contrôles extrêmement simple dont les combinaisons et l’effet sur le système font émerger une complexité à la limite du jeu d’échec.

Retro Rules

La direction graphique du jeu s’adapte parfaitement au gameplay. Le choix du tank comme avatar se justifie très bien par les mouvements lents et surtout successifs imposés par le système de jeu. Une ambiance very old school nous est offerte des pixels gros comme ceux d’un Space Invaders et la palette de couleur fonctionnant par association de deux teintes opposées sur le spectre, variant selon les modes de jeu et de difficulté. Cette atmosphère retro, renforcée par des effets sonores type 8-bit et chip-tuning, fonctionne parfaitement avec le thème du glitch. En effet, ces deux thèmes sont associés à la réelle nature du jeu par les limites et les faiblesses du logiciel et de la machine, ici simulées, mais néanmoins culturellement ancrées. Le tout garantie donc une ambiance retro gaming certaine malgré la plateforme et la récente sortie du jeu.

Si l’aspect tactile de l’Ipad n’est pas particulièrement exploité, son horizontalité est, elle, absolument adaptée. La difficulté de produire de bons jeux de stratégie sur Ipad tient en grande partie dans le manque d’espace de l’écran ne permettant pas la mise en place d’une interface surchargée, comme celle d’un RTS classique. En cela Glitch Tank, par son système simple et son interface épurée, s’adapte parfaitement à son support. Mais plus encore, l’aspect board games du jeu avec ce plateau commun aux deux joueurs et leur placement à chaque extrémité du pad associé au contrôle simultané de multiples unités, qu’il serait fastidieux d’effectuer sur un jeu de plateau classique, impose presque la tablette tactile comme une nécessité. Finalement, le seul bémol semble être la variété du jeu sur le long terme. Si les premières parties se voient considérablement différentes les unes des autres par la maîtrise progressive du système de jeu, elles évoluent de moins en moins au fil du temps. Si cette conséquence est commune à de nombreux jeux de stratégie, il serait ici appréciable de proposer quelques variations et ajouts sur les modes et actions disponibles. Un levier facile pour créer de la diversité, notamment autour du thème principal, le glitch.

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