Capsule

Enfant, je possédais une espèce de mini-borne d’arcade Space Invaders. Cette machine n’était pas plus grosse qu’un minitel, et son écran noir et vert, sous mes yeux ébahis, diffusait le ballet incessant d’aliens se déplaçant de gauche à droite. Je me souviens encore de tout ces moments à me rêver capitaine interstellaire traquant mes ennemis à l’aide de ce jouet électronique, devenu alors dans mon esprit fécond, le tableau de bord de mon vaisseau spatial. Capsule a réveillé sciemment ou inconsciemment ce sentiment un peu perdu d’aventure faisant appel à notre crédulité complice et à beaucoup d’imagination. Claustrophobes s’abstenir.

20000 lieux sous les mers

Capsule démarre très vite. Il n’y a pas de prologue. Il n’y a pas de tutoriel interminable. Juste trois boutons sur lesquels appuyer pour vérifier qu’ils marchent, comme si nous faisions le calibrage de notre submersible.

En effet, ou tout du moins c’est ce qui m’a transparu, l’idée de base est de survivre dans une espèce de sous-marin en se rendant d’une base à l’autre et en récoltant à chaque arrêt les écrits laissés derrière par nos prédécesseurs.

Bien que le joueur n’ait pas l’obligation de les lire, ces messages revêtent une importance toute significative, et participent à leur façon à créer l’ambiance si particulière de ce jeu. Ils décrivent au travers d’échanges entre différents protagonistes, une histoire passée qui deviendra assez vite notre présent à mesure que l’on avance. Subtilement, ils distillent les éléments d’une intrigue lorgnant du côté du fantastique et de l’horreur.

Car c’est bel et bien d’un survival-horror dont nous parlons. Si la majeure partie de l’action consiste à se rendre d’une base à une autre, le chemin sera tout de même parsemé d’embûches. Notre moyen de transport peut accélérer, décélérer, reculer, et c’est à peu près tout, sans oublier au passage qu’il est possible d’une pression d’activer la pulsion d’un radar qui permettra une analyse des éléments environnants. Et ce radar nous est bien utile puisqu’il est notre unique moyen de survie. Sans lui, impossible de découvrir une poche d’air ou des vents ioniques qui vont chacun remplir peu à peu notre réserve d’oxygène et de carburant qui ne cessent de se vider à mesure que nous avançons.

Car nous n’évoluons pas en trois dimensions. On ne nous offre, comme seule interface avec le monde extérieur, qu’un écran, façon tube cathodique au format 4:3, où tout y est plus symbolisé que visible en chair et en os. Cette distanciation avec l’environnement supposé réel de Capsule lui donne un style unique, mais surtout une atmosphère hors norme, renforcée par l’incroyable travail effectué sur le son.

L’immersion y est de fait totale, alors que le protagoniste que nous sommes sensé incarner respire de plus en plus difficilement, panique, et que des bruits inquiétants se font entendre. A mesure que notre progression se fait, les dangers se multiplient sous la forme de créatures sous-marines inconnues, de mines à tête chercheuse et autres mystères océaniques.

Pour espérer aller loin, car les distances séparant chaque station augmentent toujours un peu plus à chaque fois, il sera nécessaire d’explorer l’inconnu et de doser avec efficacité vos déplacements, une accélération trop forte vidant bien plus vite le carburant restant. Tout un art.

Interdit aux claustrophobes

Capsule est étonnamment prenant. Son interface est sujette à interprétation vu que tout ce que nous y voyons ne sont que les symboles d’un danger potentiel, qui ne sera vérifié qu’à la suite d’une impulsion de notre radar. Par ailleurs, le travail effectué sur le son est assez énorme, et sans lui, on s’y croirait forcément beaucoup moins. Entendre notre pilote de sous-marin suffoquer jusqu’à la mort par manque d’oxygène démontre tout de même sa nature assez jusqu’au-boutiste.

C’est un jeu très particulier qui laisse allègrement notre imagination prendre le dessus et le meilleur de nous même en nous faisons croire des choses. Si le fait de survivre constitue le cœur du gameplay, on ne pourra pas nier qu’en l’état, l’action peut vite devenir répétitive si on ne se laisse pas complètement absorber par lui. En se laissant dévorer, le joueur poursuivra cette aventure jusqu’au bout sans se plaindre, et enfin découvrir le fin mot d’une histoire finalement passionnante.

Capsule s’apprécie vraiment comme un plaisir solitaire qui ne se partage pas. Il attend de vous une certaine complicité pour fonctionner, qui implique de s’immerger le plus possible, et de laisser notre imagination faire le reste. Une fois dedans, il est difficile d’en sortir, et le mieux est encore de le faire d’une traite vu qu’il n’est pas excessivement long. Il en ressortira que vous aurez vécu une expérience singulière. Si vous n’êtes pas du genre à vous laisser happer facilement, alors oui, il ne sera pas fait pour vous. Dans le cas contraire, plongez-y.

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