Nintendo Switch (1/3) : Ressenti global de développeurs indépendants

On ne peut pas dire que ce ne soit pas tendu dans les bureaux du géant japonais. La prochaine console Nintendo, la Switch, va devoir réinstaurer la firme dans les chaumières après une WiiU qui ne s’est pas vraiment bien vendue. Aux soucis habituels d’absence d’éditeurs tiers s’ajoute désormais la crainte d’un Online plus qu’en retard. Mais finalement, qu’en pensent vraiment les développeurs des jeux de demain que Nintendo courtise sans cesse ?



Les questions étaient très simples : Que pensez-vous de la console après sa présentation ? Est-ce pour vous une console intéressante et quels sont ses qualités et défauts principaux. On vous a compilé cela au mieux et cela nous semble assez passionnant. Jugez par vous-même.

Quel est ton ressenti global à propos de la Nintendo Switch ?

David Elahee (Double Kick Heroes) : La console est plutôt pas mal dans l’intention. Je me demande si la fusion des usages mobiles et salon ne va pas leur jouer des tours mais bon, pourquoi pas.

Thomas Casamento (Overdriven Reloaded) : J’ai peur que, comme pour la WiiU, peu d’éditeurs tiers s’y intéressent vraiment, du moins pour les grosses nouveautés AAA. Je crois que les AAA (ou la VR) pour les hardcore gamers, et les mobiles/tablettes pour les joueurs occasionnels, sont des marchés plus rentables pour les tiers. Du coup, on risque d’avoir à nouveau un catalogue avec de très bons jeux Nintendo, mais globalement assez désert. Aussi, elle est peut-être un peu chère pour séduire plus facilement l’entre deux qu’elle est (ni hardcore gamer ni casual, mais s’adresse aux deux).

Pour ma part, elle me botte bien, mais je suis un fanboy Nintendo. Ça a été un coup de foudre pour moi. L’enfant que j’étais qui jouait à Link to the Past sur sa Super Nintendo il y a 25 ans se voit bien aujourd’hui jouer à Breath of the Wild partout.

Miryam Houali (A Normal Lost Phone) : D’une manière générale, l’annonce de la Nintendo Switch me laisse relativement indifférente. La seule raison pour laquelle je m’y suis intéressée ? On a du repousser la sortie de notre jeu initialement prévu pour le 12 janvier pour éviter qu’elle soit noyée dans les articles sur la console. En tant que joueuse je joue peu sur console et je suis encore loin d’avoir exploité tout le catalogue de ma 3DS. En tant que dev, étant actuellement sur du jeu mobile et PC à tout petit budget, la Switch n’est pas du tout une priorité.

Christophe Galati (Tasukete Tako-San) : Je suis très attiré par la Nintendo Switch, elle sera peut être la première console que j’achèterai Day One. J’avais trouvé le premier trailer très efficace, en savoir maintenant un peu plus sur les jeux m’a convaincu. Je soutiens Nintendo dans son choix de complètement se séparer de la course des deux autres constructeurs. En tant que joueur, je pense que je vais passer pas mal de bonnes heures dessus, avec un catalogue qui va se remplir et sera déjà conséquent la première année. En tant que créateur, j’ai hâte de pouvoir mettre les mains et expérimenter dessus.

Vincent Metallo (Koloro) : Comme toujours, Nintendo nous propose une console qui sort du lot et très innovante. Selon moi, ils ont réellement su analyser le marché et la demande actuelle. Je pense que tout comme la Wii à sa sortie, la console va faire un tabac puisqu’elle possède sa propre cible marketing qui, contrairement aux consoles Sony et Microsoft, ne s’adresse pas uniquement aux gamers. On a ici encore une console très familiale et parfaite pour des soirées entre potes mais que l’on peut également trimbaler partout. On entend déjà les inconditionnels des consoles de salon râler sur sa puissance mais il ne faut pas oublier que Nintendo n’a jamais cherché à mettre en avant la puissance de ses consoles mais plutôt leur originalité qui sont souvent un modèle d’inspiration pour les autres constructeurs. Mais malgré tout, n’étant pas un adepte des consoles portables et de salon mais plutôt un joueur PC, la console ne s’adresse pas particulièrement à moi.

Marion Bareil (Oniri Islands) : Ce qui me plaît en tant que créatrice de jeu, c’est le côté versatile et hybride de l’utilisation qu’on peut en faire, le travail réalisé sur les contrôleurs. A voir à l’usage si c’est bien ergonomique. J’ai vu beaucoup de gens se plaindre parce que ça avait l’air petit, moi ça ne me choque pas et je trouve ça bien d’avoir directement 2 contrôleurs quand tu achètes la console. Cela renforce l’esprit Party Game / Convivial et en tant que Dev, tu peux te dire que les gens n’auront pas à acheter une 2eme manette si tu créé un jeu multijoueur. Ce qui est pas mal !

Romain Claude (Splasher) : « On essaye de rattraper le coup de la WiiU en renouant avec ce qui a fait le succès de la Wii. »

Le problème (oui tout de suite des problèmes, haha) c’est que l’effet de mode autour du motion gaming façon Wii est complètement passé au profit de la VR avec les Vive, Oculus et consort. Entre parenthèses depuis que j’ai testé le Vive je suis intimement convaincu que c‘est ça, la véritable révolution du jeu vidéo, après l’arrivée de la 3D dans les années 80 et peut être celle de la Playstation 1 qui a énormément changé la façon dont le grand public voyait le jeu vidéo à l’époque (et de manière durable, c’est pour ça que je ne considère pas le feu de paille de la Wii comme une « révolution »).

En fait la grande majorité des gens, qui ont acheté des Wii par palettes il y’a quelques années, sont passés à d’autres trucs tendances pas forcément dans le jeu vidéo d’ailleurs. LE TRUC du moment, quel qu’il soit. « Le truc qu’on te dit à la télé que c’est ça qu’il faut pour briller en soirée ». Hum. De leur côté les “gamers”, donc les joueurs demandeurs d’une certaine profondeur d’expérience (disons de sollicitation par le gameplay), n’ont jamais été intéressés par cette approche réductrice du jeu vidéo, souvent synonyme de gameplays appauvris, laborieux, foireux dans 90% des cas.

Super Mario Odyssey sur Nintendo Switch

Pour avoir moi-même travaillé sur des jeux Wii et Kinect par exemple, je voyais bien qu’en tant que designer il serait très difficile de faire quoi que ce soit d’intéressant pour un public « core » ou « hardcore », si ce n’est utiliser la manette comme une … manette !! (et pointer un truc de temps en temps à l’écran, vaguement). Alors oui je vois déjà les « game design nazis » montrer les crocs pour me rétorquer qu’il fallait juste avoir de l’imagination. En effet, tu peux faire 40 party-games Wii différents pour l’apéro, qui auront chacun des mini jeux gesticulants différents. Bon ok , c’est trop le fun … En d’autres termes : Je ne crois pas au retour du motion gaming façon Wii.

En revanche, je trouve intéressant de chercher à pousser plus loin une partie du concept initié par la WiiU, à savoir le fait de rendre véritablement fonctionnelle cette histoire de balader sa « console de salon » partout dans sa maison. La WiiU était très limitée à ce niveaux-là, et le design de son gamepad faisant penser à une espèce de caricature de manette de jeu par Playskool n’inspirait ni la classe ergonomique, ni la classe visuelle. D’un autre côté, malgré que la WiiU eusse été très limitée à ce niveau-là, en tant que joueur je m’en foutait pas mal. Ce sont toujours les jeux qui font la qualité d’une console et non l’inverse. Les jeux que Nintendo nous ont amené sur WiiU correspondent bien plus à ce que je pouvais attendre d’eux que la majorité des titres ayant vu le jour sur la Wii (même si quantité de jeux oblige, statistiquement on peut dire que la Wii a accueilli pas mal de bon jeux gamer également).

En d’autres termes : Pour moi « osef » les à-côtés gadgets. Ce sont les jeux qui font la console et la WiiU avait déjà bien commencé sur ce registre (sans que les ventes suivent et c’est fort regrettable). J‘espère que la Switch concrétisera le créneaux « retour de Nintendo sur du gros jeu qui marque les joueurs » , malgré cette tentative déprimante de vouloir nous refaire le coup de la Wii. Je ne suis malheureusement pas représentatif de la masse très grand publique que Nintendo cherche à reconquérir, la WiiU en est la preuve.


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