Torment : Tides of Numenera – Le jeu du culte.

Si la religion a toujours été présente dans les jeux vidéo, elle a très souvent fait office de décors. Allant du premier Assassins Creed, se déroulant pendant les croisades mais s’intéressant trop peu à l’aspect religieux, en passant par quasi tous les Final Fantasy, où très souvent la religion n’est qu’un prétexte pour acquérir de super pouvoirs (FF X) ou bien trouver un super méchant à abattre (FF XIII)On se retrouve principalement avec des jeux effleurant nos religions, ou très souvent avec des jeux créant des religions mais en ne les exploitant finalement que très peu.


Épopée religieuse vidéo-ludique.

Pourtant, en cette période de trouble actuelle où parler de religion à une échelle internationale est quelque chose de très sensible, InXile prend le pari (presque) fou de sortir un jeu dont la croyance envers un être supérieur est la thématique et la quête principale. Heureux hasard, Torment : Tides of Numenéra est la suite d’un des RPG les plus vénérés et adulés : Planescape Torment.

Dans Tides of Numenéra, le joueur incarne un reliquat, le dernier pour être précis, du Dieu Changeant. Ce dernier, humain à la base, a trouvé le moyen de vivre éternellement en changeant de corps. Ainsi au fil des années, il façonne ses corps, les reliquats, afin de s’approcher de la perfection. Une fois l’objectif du corps créé atteint, il s’en débarrasse en l’envoyant sur Terre, puis prend possession d’un nouveau corps. Votre histoire commence à ce moment précis, lors de votre chute vers les falaises de Sagus, où l’on apprend qu’une conscience se créé dans chacun des reliquats abandonnés par son créateur.

Tout au fil de l’aventure, notre reliquat récupérera des souvenirs, soit d’autres reliquats, soit du Dieu Changeant lui-même. Tout cela s’obtient en observant des vestiges du temps passé, en arrivant dans un endroit ou en discutant avec une personne. Tous ces souvenirs, apportés dans un ordre chronologique totalement aléatoire, vont permettre au joueur de comprendre l’histoire du monde et l’impact qu’a eu le Dieu Changeant sur celui-ci. C’est après avoir découvert un grand nombre de souvenir, et surtout avoir découvert et compris l’intérêt des reliquats, que tout le sens religieux du titre prend sens.



Livre sacré vs Torment

Si l’on simplifie à outrance la religion, qu’elle soit catholique, musulmane ou juive, on en retient une seule chose : elles sont toutes basées sur un livre, considéré comme sacré, où le croyant (doit) applique(r) une ligne de conduite décrite dans le dit livre sacré. Ce livre sacré peut être vu comme un recueil d’histoires courtes, se déroulant dans un même monde, notre planète, racontant l’épopée de personnes aux capacités extraordinaires, allant d’Adam et Eve, « premiers » hommes à avoir mis un pied sur notre planète, en passant par des personnages comme David (celui qui a botté le popotin de Goliath), Noé et son arche, jusqu’à des personnages ayant marqués encore plus leur empreinte, comme Mahomet, Moïse et Jésus.

Le point commun entre tous ces personnages et qu’ils sont guidés par un être divin, Dieu, afin que tous ces derniers êtres d’exceptions puissent façonner le monde à l’image de la volonté du dieu qu’ils suivent, pour que la population puisse vivre en harmonie. Si l’on fait le parallèle avec Torment, on retrouve exactement le même schéma : Le Dieu Changeant prend la place de Dieu, qui créé des reliquats avec une capacité spécifique pour chacun d’entre eux, afin qu’ils aient un impact particulier sur le monde, étant ainsi les hommes et femmes d’exception. C’est-à-dire les apôtres et les prophètes de nos religions et où les histoires racontées sont obtenues via les souvenirs qui se déclenchent lorsque le reliquat que nous incarnons découvre le monde, façonné par ses prédécesseurs et dont les vestiges des actions de ceux-ci sont parfaitement apparents, que cela soit par des monuments, des personnes ou même des villes entières.



Et le message dans tout ceci ?

Tout comme dans The Shivah de WadjetEye Games, où son développeur principal Dave Gilbert s’interroge sur sa pratique du judaïsme, Torment pose une réflexion, totalement neutre et ne dépendant que des convictions du joueur sur l’impact et la nécessité de suivre les règles (qu’elles soient bonnes ou mauvaises) d’une personne / être supérieur. Le Neuvième monde, que l’on parcourt légèrement, mais que l’on découvre via son histoire, montre de manière équitable et neutre des bienfaits (sauvegarde, protection et vie en communauté, que l’on retrouve via la ville de Sagus) aux atrocités que peuvent provoquer une dictature de l’esprit via la guerre sans fin, qui oppose l’armée du Dieu Changeant à celle du premier reliquat, ce depuis plusieurs siècles et dont la fin ne pourra jamais arriver. Toute cette réflexion est apportée par le statut du reliquat que nous sommes, le dernier.

Le fait d’être le dernier reliquat donne deux axes pour deux réflexions, à l’image de la séparation que l’on trouve aujourd’hui entre la religion catholique et la religion musulmane : somme nous le dernier reliquat en date ou le dernier reliquat, le définitif, qui apportera le dénouement voulu par le Dieux Changeant ?

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