BAFL – Brakes Are For Losers

J’ai beau ne publier sur GSS qu’une fois toutes les lunes de sang, cela n’empêche pas mon rédac’ chef préféré d’être toujours parfaitement à l’écoute de mes désirs. À peine ai-je évoqué « arcade » dans la liste des types de jeu qu’il me plairait de tester, qu’il m’a demandé direct si j’étais tenté par une distribution de BAFL. Eh oui, que voulez-vous, on est comme ça, entre lui et moi, ce n’est que de la tendresse. Bref, je m’égare : avec BAFL – Brakes Are For Losers, je voulais de l’arcade et je n’ai pas été déçu. Enfin, si, quand même un peu…


Les freins, tintin !

Son chouette trailer, façon pub eighties sur VHS, met tellement de points sur les « i » qu’on appelle ça des trémas : BAFL se veut un hommage assumé au panthéon des jeux de course vus du dessus sans scrolling, nommément Indy Heat, Super Sprint et la référence qui résonne le plus généreusement dans mon petit cœur, Super Off-Road. Et comme si cette orientation arcade ne suffisait pas, le studio Oudidon à l’origine du projet a fait un choix de gameplay radical : accélération automatique et pas de freins. C’est ce dernier choix qui structure toute l’identité du jeu, la plupart des calembours et des détournements de culture pop tournant autour des mots « frein » ou « brake ». Parler de course effrénée, chez Oudidon, n’est donc pas une facilité de langage. C’est une réalité.

L’écran de chargement parodie magnifiquement le fameux écran FBI inséré dans les jeux d’arcade américains durant les années 90.

Les freins font un brake

C’est donc parti pour des courses de huit petites voitures dans des décors colorés, avec un aspect maquette pas désagréable à l’œil et quelques effets graphiques, de brouillard notamment, intéressants. Le gameplay est minimaliste : direction, nitro et l’indispensable… klaxon. Les tracés de la dizaine de circuits sont à la fois simples, variés et le jeu les propose dans diverses versions (inversés ou de nuit). L’étroitesse des circuits favorise le contact, et il faut savoir prendre la corde et jouer avec les bordures (et tant pis pour les Syldaves) pour passer devant son adversaire. Les bonus apparaissent aléatoirement sur le chemin et il suffit de passer dessus pour les activer immédiatement. Une icône bombe ou inversion des commandes activée balance ainsi instantanément le malus correspondant aux sept adversaires d’un coup. Chaque circuit comporte par ailleurs des stands où l’on peut s’arrêter en cas de risque de casse, sachant qu’il est tout à fait possible de virer sans ménagement un adversaire de son stand pour l’empêcher de s’y recharger. En cas de casse, le règlement est assez punitif puisque la voiture doit s’arrêter quelques secondes, avant de redémarrer avec un niveau d’énergie minimal, risquant ainsi une nouvelle casse à tout moment.

Petit coup de cœur pour ce décor inspiré de Jurassic Park et ce tracé bien tortueux, voire… dinosaurueux.

La bataille du frein

À ce compte, le classement peut facilement se trouver bouleversé, et quand on sait que le tout est jouable à huit (avec l’option de partager un pad à deux comme au bon vieux temps de Micro Machines sur Super NES), on comprend qu’un des buts de BAFL est de pousser des BFF à se traiter de FDP en toute convivialité. Néanmoins, cette orientation multijoueur impose deux remarques. La première est de déplorer l’absence de jeu en ligne. C’est indéniablement le plus gros défaut du jeu. La seconde (mais peut-être est-ce là une pure remarque de l’indécrottable consoleux auteur de ces lignes) est que cette orientation multijoueurs local aurait sans doute été plus sa place sur une PS4 ou une Switch.

Avec ce thème Halloween de saison et ce tracé en forme de crâne, en mode course parfaite j’ai eu un peu l’impression de tourner inlassablement autour de mon cerveau sans jamais réussir à le trouver.

L’histoire sans frein

Le mode championnat se déroule sur dix courses de soixante secondes, entre lesquelles les joueurs investissent leurs gains pour améliorer leur véhicule (vitesse, armure, etc.). En partie rapide, cette phase d’améliorations est zappée pour privilégier l’enchaînement des courses. Dans ces deux modes, le vainqueur d’une course est celui qui a accompli le plus grand nombre de tours dans le temps donné. Le troisième option « Partie custom » propose de créer sa propre épreuve avec quelques options supplémentaires, comme une règle sans possibilité d’arrêt aux stands, où le dernier à ne pas avoir cassé sa machine est déclaré vainqueur.

BAFL propose différents revêtements, comme la boue ou, représentée ici, la glace. Et le petit détail qui fait plaisir : les traces de pneus restent à l’écran durant toute la course.

Brakedance

À cela s’ajoute un mode défis consistant, avec pour chaque circuit un contre-la-montre et une épreuve « course parfaite » où il faut parcourir la plus longue distance sans toucher les bords du circuit. C’est dans ce dernier mode que le parti pris minimaliste de BAFL révèle le mieux son potentiel. Seul sur la piste, le joueur doit apprendre à toujours mieux maîtriser ses trajectoires pour exploser les records de distance parcourue. Le jeu sait alors ménager des moments de plaisir ludique basique mais réel, où l’on ressent cette satisfaction d’avoir trouvé le timing idéal, dompté une série de lacets bien serrés et réalisé un tour parfait. Une façon de renouer avec le feeling arcade auquel BAFL rend hommage : le joueur, la machine, le skill.

Troll ultime dans le menu d’amélioration des voitures : les freins sont dispos à l’achat… à un prix inatteignable, plaçant la plaquette de frein au prix de la plaquette de beurre en temps de pénurie.

Ambitieux, BAFL vise le marché international (le jeu est joliment localisé en dix langues) et un positionnement plutôt haut de gamme dans la jungle du jeu indé, avec une finition impeccable… et un prix de base à 9,99 €. Sans aller jusqu’à dire que BAFL coûte un frein, cela reste un placement prix osé. Je déteste par avance le côté « guide d’achat » de la phrase qui suit, mais le constat s’impose : c’est là, et uniquement là, que le BAFL blesse : le concept radical vaillamment assumé, l’humour omniprésent et l’identité visuelle réussie ne font pas oublier l’absence de mode en ligne et un contenu un peu limité pour le prix. BAFL a finalement moins un problème de freins qu’un problème de braquet.

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