Reportage

Horizon(s) : A l'Ouest, quoi de nouveau ?

Horizon(s) Bordeaux Videogames forum : Uncharted Futures, Next Level Strategies. Je vous préviens c’est la dernière fois que je l’écris en entier. Non, ce n’est pas un obscur jeu gratuit qui repomperait les mots-clés des succès de Sony pour capter l’attention dans les boutiques en ligne. C’est sérieux là, oh.

Alors que l’industrie du jeu vidéo tousse un peu en cette rentrée 2023 – imaginez juste qu’à chaque quinte, ce sont des emplois qui tombent par dizaines -, les évènements business restent tournés vers un avenir qu’ils espèrent évidemment radieux. Un “futur inexploré” fait de tendances, d’investissements et d’opportunités. SO Games, l’association des professionnels du jeu vidéo néo-aquitain, majoritairement constituée de représentants de studios – une sorte de Syndicat National du Jeu Vidéo local – a donc organisé pour la deuxième fois son évènement Horizon(s) sous les ors de l’Opéra National de Bordeaux. Un choix de lieu qui pose le jeu vidéo dans le paysage économico-culturel comme un énorme parpaing doré dans le jardin culturel local. Ce n’est pas un choix des plus subtils, mais à croire que cela fonctionne et que ça brille assez, en tout cas suffisamment pour attirer l’attention des médias locaux.

Deux journées de rencontres, tables rondes et autres réseautages : les professionnel·l·e·s du jeu vidéo parlent aux professionnel·l·e·s du jeu vidéo, sous le parrainage des gloires locales Asobo Studio, Ubisoft Bordeaux et Shiro Games.  On y a parlé jungle des financements pour des studios – de la banque jusqu’aux financements européens –  structuration de la filière du jeu vidéo – une filière où 95% des formations sont privées – ou encore lutte contre le marché gris et les sites de revente de clés volées. L’écosystème est certes complexe, mais pas tellement éloigné des problématiques que l’on retrouve dans toute autre industrie culturelle, que ce soit celle du livre, du cinéma ou encore de la musique : on est là pour faire un état des lieux prospectif d’un marché du point de vue de celles et ceux qui éditent et/ou financent, non pas pour témoigner d’une quelconque vitalité artistique ou d’avoir une approche culturelle et critique du milieu et de son medium

En revanche, dès qu’il faut flairer des filons aussi juteux qu’évanescents, le jeu vidéo n’a pas son pareil. Oubliez le Web 3.0 – en tout cas pour le moment – la tendance du moment c’est évidemment l’Intelligence Artificielle et son cortège de promesses infinies aux kilotonnes de polygones et aux zillions de textes générés à la chaîne. Si des présentations comme “Faire son jeu de rôle en monde ouvert en un jour grâce à l’I.A générative”  font lever un sourcil soupçonneux, d’autres abordent la problématique avec un recul bienvenu. L’Intelligence Artificielle dans les domaines artistiques, ce sont de vraies questions éthiques et juridiques, et les conférences sur le sujet ne l’ont pas oublié : mention spéciale à la rencontre avec Andrea Dufaure et Peter Lewin, avocats spécialisés dans la propriété intellectuelle et les garde-fous que cette dernière peut incarner sur le sujet des IA génératives.

Ce type d’initiatives permet tout de même de révéler en creux d’autres aspirations pour la culture jeu vidéo. On peut quand même souhaiter  voir émerger un évènement rassemblant travailleurs, travailleuses du jeu vidéo, journalistes et cheurcheur·euse·s pour voir poindre d’autres sujets moins “business” et plus proches des conditions de production derrière les succès d’hier, d’aujourd’hui et de demain. La filière jeu vidéo, ce n’est pas que des chiffres et des opportunités d’investissement, il va falloir commencer à le dire au grand public, et pas forcément sous les moulures chatoyantes de l’Opéra.

Bastien Castellan / BassKass

(Crédit photo : Valentin Videgrain / Horizons 2023)