Critique

Outriders

Skywilly
Publié le 14 avril 2021

Développeur

People Can Fly

Éditeur

Square Enix

Date de Sortie

1er avril 2021

Prix de lancement

60 € - Inclus au Game Pass Xbox

Testé sur

Xbox Series S

Petite précision : le jeu est sorti dans un état déplorable le 1er avril et à date de parution de cette critique, énormement de joueurs ont perdu tout leur inventaire suite à un patch. Les réponses apportées ne sont pas suffisantes, beaucoup de joueurs ayant précommandé le jeu ou répondu présent le jour de la sortie se sont vu pénalisés et globalement, il serait peut-être temps que certains éditeurs cessent de sortir des jeux dans un état déplorable en attendant que les joueurs les « débuggent » à leur place. Venant de Square Enix et son execrable Marvel’s Avengers de l’année dernière, c’est d’autant plus rageant.

People Can Fly c’est avant tout un studio polonais qui s’est fait connaître avec sa saga de FPS « Painkiller« . Ensuite, rachetés par EPIC Games, ils ont travaillé sur du Gears of War (Judgement principalement) et ont créé leur propre folie : Bulletstorm. Prenez ces deux derniers titres, secouez bien le tout et vous aurez pas mal des idées de ce Outriders qui n’est pas un jeu service, mais une sorte de Gears of War en mécaniques de progression de Hack’n Slash, avec du loot de partout, tout le temps, au centre de tout le gameplay.

"Des Hominidés !"

Vous êtes un Outriders, une sorte de soldat d’élite parti en expédition aux confins de la galaxie après que l’humanité ait rendu la Terre complètement invivable. Découvrant un nouveau potentiel berceau de l’humanité, votre héros fraichement personnalisé (homme ou femme, quelques visages, coupes de cheveux et cicatrices…) se lance dans l’exploration des lieux et la recherche d’une balise, permettant au vaisseau principal de se poser en lieu sûr. Sauf que voilà : une tempête électromagnétique, une substance noire toxique et l’apocalypse vous tombent dessus. On vous met en stase, puis on vous réveille 30 ans après ce beau bordel. 

Entre temps, qu’a fait l’humanité ? Elle vit en harmonie avec la nature et s’est trouvé un moyen de communier avec les forces en présence ? Bien sûr que non ! Les humains vivent dans des camps, sont surarmés, déjouent des milices de fous-furieux qui s’amusent avec le corps de leurs cibles et au milieu de tout cela, la tempête électromagnétique a aussi amené son lot de pouvoir à des élus. Bonne nouvelle quand même : vous en faites partie.

Outriders ne propose pas un monde libre, mais un jeu de tir à la troisième personne se déroulant dans plusieurs lieux fermés, eux-mêmes divisés en plusieurs secteurs séparés par un écran de chargement. Sur Xbox Series, ce chargement est pratiquement instantané. Sur d’autres consoles plus « anciennes », c’est plus compliqué… Se jouant de seul à trois joueurs, Outriders reprend exactement le gameplay d’un Gears of War : vous allez vous mettre en position de couverture derrière des blocs et tirer sur vos ennemis. Seule originalité : trois pouvoirs à débloquer selon la classe que vous choisirez, parmi les différents éléments proposés. Choisissez bien après le tutoriel, puisqu’il est impossible de revenir en arrière sous peine de devoir recommencer la création de personnage et le début du jeu.

De gros airs de hack & slash

La courbe de progression du jeu est très particulière. Vous avez 30 niveaux d’expérience à acquérir au fil de vos missions réussies et des ennemis éliminés tout au long des différents niveaux. Mais vous verrez aussi une autre jauge à l’écran, celle du « niveau de monde ». Celle-ci augmente plus ou moins comme l’expérience, mais si vous mourrez, vous perdez un peu de cette jauge. Le but est donc de tenir bon jusqu’à la remplir pour débloquer le « niveau de monde » suivant qui représente finalement un mode de difficulté plus élevé. Il y a 15 niveaux de difficulté à débloquer qui, exponentiellement, améliorent tout ce qui fait votre progression : du loot de meilleure qualité et de plus grand niveau, lié à des ennemis évidemment plus costauds à battre.

L’idée est de permettre aux joueurs de tenter de se défier en augmentant la difficulté, avec la promesse d’obtenir du loot de plus grande qualité et donc une force de frappe plus amusante et violente. Le problème c’est que ce système de jeu ne fonctionne absolument pas. Tout est totalement déséquilibré : en Solo, surtout, les cinq premières heures de jeu vous obligent à mourir à répétition pour augmenter de niveau de personnage et supporter la difficulté des trois/quatre premiers « niveaux de monde ». Une fois un peu tranquille et dans une boucle « confortable » (venant avec les pouvoirs débloqués et quelques bonnes armes récupérées), on devra attendre cinq autres bonnes heures pour espérer tenter des niveaux de difficulté plus élevés sans retomber dans un cycle de vagues ennemies trop complexes à dépasser. Comprenez bien que ne pas tenter de niveaux de difficulté supérieurs, c’est aussi s’obliger à obtenir du loot d’armures et d’armes en deçà de notre niveau. Le jeu force donc clairement au « dépassement de soi » sans pour autant le lier à un système vraiment fonctionnel.

Alors il y a plusieurs techniques, très Hack & Slash dans l’âme par ailleurs. Le forcing pour commencer : on recommence une étape jusqu’à ce que l’XP obtenue entre les morts de notre personnage lui permette de mieux s’en sortir. On peut aussi acheter de l’équipement aux vendeurs des différents camps de chaque biome du jeu, ça, c’est pour les joueurs qui aiment les transactions, mais il faudra alors se passer du démantèlement des armes qui permet d’améliorer les statistiques de son équipement. Bref, les idées sont là, mais s’imbriquent un peu mal. En multijoueur, tout se passe bien mieux et de façon plus fluide, mais des passages totalement déséquilibrés seront quand même souvent de la partie, trop faciles ou trop difficiles, c’est selon la constitution de l’équipe.

Pour donner une idée de complexité : j’ai terminé Outriders en 25 heures environ, avec toutes les quêtes annexes complétées, un personnage au niveau maximum de 30 et un « niveau de monde » de 9 sur 15. Soit la moitié de la proposition de loot et de niveaux.

Sci-Fi décomplexée

Outriders c’est avant tout un gros nanar bien cool et con de science-fiction comme on nous en pondait des tonnes dans les années 90. Le jeu a de gros airs de Absolom 2022 (No Escape dans son titre original) pour vous donner une bonne idée de l’ambiance globale, les gros muscles et les guns de deux mètres en prime. Tous les personnages se crachent à la figure, s’insultent et en ont marre de tout, tout le temps, un peu tous « trop vieux pour ces conneries ». C’est baraqué et stupide, mais hommes et femmes sont logé.e.s à la même enseigne. Tout cela donne un jeu vulgaire, souvent moche, gris, brun et terne, mais quelques biomes et de rares scènes de bravoure viennent motiver les troupes pour une aventure principale qui n’a pas que de mauvaises choses à proposer en termes d’écriture. 

Ponctuée par la musique de Inon Zur (Fallout, Baldur’s Gate, Dragon Age…) la mission de sauvetage de l’humanité n’en est que plus « badass » et bourine. Il y a de grands moments épiques à jouer dans Outriders, surtout à plusieurs, du moment qu’on en accepte l’aspect rétrograde et crado d’un gameplay déjà vu mais qui, mine de rien, a déjà fait ses preuves.

Surtout, si sa mécanique de niveaux de difficulté est complètement cassée (on espère que les développeurs parviendront à la réparer dans les semaines à venir), Outriders n’en est pas moins très généreux et amusant en tant que machine à loot. People Can Fly a fait le choix simple mais efficace de diviser les armes en habituelle rareté, mais de leur apporter des avantages très précis en fonction de cela. Une arme grise ne fait que tirer. En vert, on a un peu d’effets passifs. En bleu, elle possède des améliorations de vos pouvoirs. En violet, l’arme a carrément le droit à de gros effets élémentaires. Et en orange doré, évidemment, c’est le légendaire qui tranche nettement avec l’esthétique extrêmement quelconque de tout l’arsenal puisque ce sont les seules qui ont le droit à un design vraiment particulier. Et honnêtement, si le mauvais goût est certes souvent de la partie, on ne peut pas nier le fait que ces armures et armes légendaires sont toutes très bien liées entre elles. Il y a facilement moyen d’obtenir un personnage visuellement très différent de celui des potes qui nous suivent dans l’aventure.

25 heures de jeu, et après ?

Comme précisé plus tôt, le jeu se termine dans sa globalité, quêtes annexes comprises, en 25 heures environ. Mais le jeu ne s’arrête pas du tout à celà. Sans en dévoiler la raison scénaristique, plusieurs missions d’affrontements de hordes en multijoueur s’ouvriront au joueur. Terminer ces hordes offrira une toute nouvelle ressource permettant d’être échangée contre des objets au niveau encore plus élevé. Au risque de perdre ceux qui n’aiment pas les jeux « à systèmes », ces hordes ont elles aussi le droit à des niveaux de difficulté à débloquer (comme le niveau de monde pour l’aventure principale) et pour en finir avec le jeu dans son entièreté, à l’heure de sa sortie, il faudra attendre le 15ème niveau de difficulté de ce mode « endgame ». Seul moyen pour l’instant de se rendre au tout dernier environnement proposé.

Si vous avez aimé l’ambiance globale du jeu et de son histoire, ce mode « Hordes » en fin de jeu est plutôt malin puisqu’il complète le récit de quelques-unes des missions ayant fini en queue de poisson dans la trame principale. De vieux ennemis à définitivement terrasser, des explications annexes sur une situation déjà vécue, etc. Toutes les excuses sont bonnes pour donner du sens à vos missions de boucherie en terrain ennemi. Mention spéciale à cette discothèque clandestine qui nous permet de frapper de l’ennemi sur des airs de « Wub Wub »

Outriders est vraiment un gigantesque nanar décomplexé, tout droit sorti des années 2000, mélange presque assumé de Gears of War et de la nouvelle de science-fiction qui traine entre deux dictionnaires dans la bibliothèque poussiéreuse de papy et mamie. L’humanité y est aussi vulgaire et crasseuse que l’ambiance globale proposée, mais le charme opère malgré tout. Pas grâce à la difficulté globale du jeu, largement cassée par son principe de progression mal fagoté, mais surtout pour ce qu’il propose de pouvoirs à claquer en multijoueur tout au long d’un scénario qui fait le taf. Ce n’est pas le jeu du siècle, on en est même très loin : mais il est curieusement bien plus divertissant qu’il n’en a l’air !

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