Un mauvais Sonic de plus…
Critique
Not For Broadcast
Développeur
Not Games
Éditeur
Tiny Build
Date de Sortie
25 janvier 2022
Prix de lancement
20,99 €
Testé sur
PC
Ce texte n’a été altéré en aucune manière de façon à refléter l’exactitude de l’avis du testeur. Ce document est conforme à la volonté de BIIIIIIIP.
Vous êtes-vous déjà imaginé vous retrouver dans les chaussures du mec qui fait le montage à la volée lors d’une émission de télé ? Après-tout c’est assez simple, il suffit de pointer la bonne caméra sur la bonne personne, lancer les transitions, les titres, les pubs et c’est parti ! Et bien Not For Broadcast va vous permettre de réaliser ce BIIIIIIP.
Caméra 1 !
En effet, suite à un coup de chance, ou pas forcément, vous vous retrouvez à remplacer Dave, le mec qui fait ça habituellement, pour réaliser la diffusion du journal de 18h lors de la soirée des élections de 1985 où Advance, un parti BIIIIIP, remporte les élections et promet du changement. À commencer par un certain nombre de choses concernant la société et comment sont diffusées les nouvelles. Dans l’esprit il va donc falloir composer avec vos propres convictions, essayer de louvoyer avec les volontés de la direction de la chaîne, l’ego des présentateurs/journalistes de plateau, les exigences du gouvernement et évidemment contenter l’audimat. Not For Broadcast est donc aussi un simulateur de stress.
Caméra 2 !
Libre à vous donc de censurer ou non certains propos, de diffuser les bonnes pubs au bon moment, d’orienter les informations avec certains cartons, et fatalement réussir ou non le journal du soir sous peine de BIIIIIIP. Entre chaque « soirée » de journal, vous aurez la possibilité de faire des choix de vie quotidienne amenant à des conséquences personnelles plus ou moins grave, et sans forcément refléter ce que vous montrez au journal du soir. Le jeu est à grande part narratif, et il faudra faire les « bons » choix si vous voulez qu’un avenir serein se dessine après un run d’une demi douzaine d’heures. Évidemment les choix ne se font pas qu’à domicile et vous aurez des opportunités de faire pencher la balance vers BIIIIP en sélectionnant les bons plans, ou les bonnes diffusions au moment opportun. Il y a 14 fins possibles, et je n’ai pas spécialement pu déterminer ce qui amenait vers les unes ou les autres, donc une rejouabilité certaine s’offre à vous ! Les différentes séquences se déroulent sur sept ans, et les conséquences des décisions prises dans le studio et dans la vie privée ont un impact assez saisissant sur le déroulement du jeu.
Ah oui, parlons jeu maintenant. Puisque les développeurs, ces BIIIIIP ont décidé qu’être un pousse bouton était un travail trop facile, ont rajouté des petits éléments pour qu’on puisse s’amuser quand même lors des diffusions. Le panneau de contrôle (qui n’a rien d’un cockpit de lance missile sol air soviétique, rassurez-vous) est composé de plusieurs plateaux et interfaces nécessitant une attention particulière. Déjà il faudra faire le montage entre les différentes caméras, sans lasser le spectateur, en affichant ce qui est le plus judicieux, mais pas trop longtemps sinon l’audimat descendra. Ensuite le panneau électrique peut avoir des ratés, et il faudra garder un œil dessus (ou une oreille, les différents bruits aident particulièrement à savoir ce qui déconne). Sans vraiment de lien, des interférences se produisent régulièrement et il faudra aligner le signal pour que la diffusion reste claire. On ne voudrait pas, en plus que le téléspectateur BIIIIIP. Pour cela, un gros bouton rouge « censure » sera à actionner quand l’un ou l’autre invité prononcera des BIIIIP et peut-être aussi pour camoufler des choses que le public n’est pas obligé de savoir, comme ce qui se passe réellement dans les BIIIIIIP.
Caméra 4 en plongée sur le parking
Sans trop en dire, le jeu révèle des surprises un peu partout et chaque séquence introduit des nouveautés qu’il faudra assimiler et ajouter aux actions à faire. Un mode défi permet de rejouer les séquences en y combinant plusieurs incidents techniques comme des BIIIIIIP en même temps que les BIIIIIIIP alors qu’en mode histoire ça n’arrive pas. Il faudra évidemment être encore plus vigilant lors de ces défis, afin que l’audimat reste élevé, envers et contre tout (boutons vous électrocutant, ou encore surchauffe des amplis, ou un piratage de l’antenne par ces BIIIIIP de BIIIIIIP qui veulent annihiler les efforts de notre cher gouvernement).
J’ai pris pas mal de plaisir sur ce p’tit jeu, comme disent ses développeurs, et il s’avère que les acteurs ont un certain talent et cet humour anglais pince sans rire vraiment charmant. Faire se dérouler l’action du jeu dans les années 80 fait un peu passer le côté cheap des plateaux et du matériel à notre disposition, cependant les propos du jeu sont terriblement actuels et représentent beaucoup les angoisses d’une société un peu perdue où les extrêmes montent en flèche et sur les dérives d’un régime à la base bienveillant glissant vers le totalitarisme, mais bien marketé et entraînant avec lui son système d’information et sa société. Bon c’est souvent les pieds dans le plat et vraiment gros, mais l’humour fait passer la pilule et les instants dramatiques sont réellement touchants (et ces acteurs sont parfaits). Le gameplay est suffisamment accrocheur et les différentes conséquences des choix suffisamment marquées pour qu’on ait envie de continuer et d’y revenir en tout cas. La traduction française est un peu à la ramasse dans la version presse, et (vous vous en doutez) le jeu étant extrêmement bavard, les murs de sous-titres et les textes mal ou non traduits sont légion. D’autant que la plupart des textes narratifs prennent soin d’utiliser des pronoms neutres, ça risque d’être très compliqué à traduire. Pour autant, l’humour tendant du sociétal à l’absurde sans jamais tomber dans la vulgarité est « on point » comme disent les anglais, si vous aimez les Monty Python (et plus précisément Fawlty Towers) ça va vous parler.
Jeu narratif qui n’a pas oublié d’être un vrai jeu amusant (mais parfois frustrant, les baisses d’audimat étant vraiment brutales et perturbantes, je suis passé en mode panique tripotage des boutons à plusieurs moments avant de savoir que j’avais juste pas lancé la pub), drôle par moments, dur à d’autre, certains évènements tapent vraiment proche de la maison (comme disent les anglais aussi, tiens) et on y a du grain à moudre. Un pur produit de notre époque, post brexit, post Trump où la vérité est entre les mains de celui qui pointe les caméras (mais il s’amuse bien en le faisant). Un jeu politique et drôle, et politique.
Franchise ressuscitée de la plus belle des manières