Critique

The Lord of the Rings: Gollum

Nyam Hazz
Publié le 1 juin 2023
The Lord of the Rings: Gollum

Développeur

Daedalic Entertainment

Éditeur

Nacon

Date de Sortie

25 mai 2023

Prix de lancement

49,99 €

Testé sur

PC

Si vous suivez un tant soit peu l’actualité vidéoludique, vous avez sans doute déjà dû voir que The Lord of the Rings: Gollum, édité par Nacon, a fait un flop, tant auprès de la critique que des joueurs, lors de sa sortie le 25 mai 2023 sur PC, PS5, PS4, Xbox Series et Xbox One. Certains ne se sont d’ailleurs pas privés de rapidement le qualifier de pire jeu de l’année puisqu’il est classé dernier sur les agrégateurs de notes. Et Daedalic Entertainment, le studio allemand à qui l’on doit la tétralogie Deponia, ou encore Blackguards, s’est immédiatement confondu en excuses, promettant de corriger au plus vite les nombreux problèmes techniques rencontrés. Les reports à répétition, depuis son annonce en 2019, ainsi que le changement d’éditeur et les piètres images qui avaient été partagées, avec un Gollum n’enthousiasmant pas les foules, avaient déjà bien savonné la planche, mais est-ce que ce Gollum mérite vraiment le traitement qui lui est réservé ?

Un matériau fidèle à l’œuvre originale

Le personnage de Gollum est sans doute l’un des plus intéressants du Seigneur des Anneaux. C’est en tout cas le plus torturé. Les fans de l’univers fantasy créé par J.R.R. Tolkien pouvaient donc attendre beaucoup de la version proposée par Daedalic qui s’est donné comme mission, à travers une histoire originale inspirée des aventures contées par l’auteur britannique, d’analyser plus en profondeur les tourments qui l’assaillent. Ce n’est pas seulement ici une créature laide et vicieuse, c’est aussi une victime renfermant encore de la bonté au fond d’elle, mais dont la dépendance envers l’Anneau est plus forte que tout. Or, celui-ci lui a été dérobé par un vilain Hobbit et sa seule préoccupation est maintenant de retrouver son Précieux. L’épopée, avant tout narrative et dirigiste, qui nous est proposée, nous entraîne dans la Terre du Milieu, à travers une histoire qui suit les premiers chapitres du Seigneur des Anneaux. Elle explore un autre axe du récit axé sur Gollum, afin d’approfondir celui-ci.

Interrogé par Gandalf, qui pour le coup endosse plutôt le rôle du méchant, Gollum revit ses années passées dans les Montagnes des Monts Brumeux et au Mordor où, après avoir été emprisonné par les serviteurs de Sauron, il a été réduit en esclavage dans les Puits Noirs de Barad-dûr. Il doit alors faire en sorte de survivre et surtout de trouver un moyen d’échapper à la Bouche de Sauron, comme à l’araignée Shelob, afin de retrouver Bilbo. Nous suivons ainsi, pendant une quinzaine d’heures, ses pérégrinations jusqu’à la Moria, en passant par le donjon du roi des elfes Thranduil, le père de Legolas, suite à sa capture par Aragorn. Jusque-là on pourrait se dire que tout va bien, et c’est effectivement le cas, surtout que la bande-son comme les doublages (en VO sous-titrée) sont tout à fait honorables. En recourant à des experts en la matière, tant pour le récit que les dialogues, Daedalic a su rester fidèle à l’œuvre de Tolkien et développe un pan de l’histoire qui n’est pas inintéressant.

Avec une technique à la ramasse

Mais c’est surtout Gollum et son dédoublement de personnalité qui sont appréciables. À la fois méchant et vicieux dans le rôle de Gollum, nous pouvons aussi être prudent et gentil en tant que Smeagol. Et non seulement ils discutent efficacement entre eux, chacun défendant son point de vue, mais des choix moraux nous sont régulièrement proposés, avec parfois la nécessité de convaincre son autre moitié. À chacun de décider pour quelle personnalité opter, sans toutefois que suivent forcément des conséquences distinctes. Le fait qu’il s’inscrive ici davantage en victime, pas seulement des Orques mais aussi des habituels héros que sont les Elfes et Gandalf, apporte également une autre lecture. Tout le monde semble lui en vouloir, et il ne comprend pas pourquoi. Malheureusement, malgré toute la bonne volonté que l’on peut vouloir mettre à donner ses chances au titre et les aspects positifs sus-cités qu’il renferme, on ne peut pas faire abstraction de sa technique défaillante.

Graphiquement, malgré les dernières techniques exploitées (RTX, DLSS, Reflex, FSR 2), on a davantage l’impression de jouer à un jeu de 2003 que de 2023. De plus, les animations sont bien souvent aux fraises, sans parler de la synchronisation labiale pour ainsi dire inexistante. C’est bien simple, on a le sentiment que certains personnages n’ont pas été terminés, rappelant la piètre expérience que certains ont pu vivre avec Cyberpunk 2077. Déjà que les grottes et les mines à répétition ne sont pas des plus chatoyantes. Heureusement, l’arrivée chez les elfes fait du bien en apportant davantage de verdure et de couleur. Mais il faudra vous contenter de ces deux environnements. De plus, le jeu est loin d’être dénué de bugs (personnages marchant sans cesse contre un mur, bloqués dans le décor, en lévitation…), le pire que nous ayons rencontré étant celui au cours du neuvième chapitre (sur 10) qui rend systématiquement notre personnage impossible à déplacer après avoir exécuté une action incontournable, empêchant ainsi de boucler l’aventure…

Et un gameplay grossier

Vous comprendrez qu’il est donc bien difficile dans de telles conditions de conseiller de se lancer dans Gollum avant l’arrivée des patchs promis. Mais ceux-ci seront-ils suffisants pour sauver le soft ? Ce n’est pas certain, car il reste encore un autre souci, celui du gameplay. Pour ma part, j’ai pu faire avec, mais il faut bien reconnaître que l’IA des adversaires n’est pas la plus fine que l’on ait pu croiser, bien au contraire, et que la maniabilité peut être exaspérante, notamment du fait de problèmes de caméra qui nuisent à la visibilité, voire l’anéantissent totalement. Or, Gollum axe essentiellement son gameplay sur de l’infiltration et de l’exploration à base de plateformes, ce qui, surtout dans ce dernier cas, nécessite de pouvoir bien viser, comme pour les sauts en arrière. L’être multi-centenaire a en effet non seulement l’esprit vif mais est aussi doté d’une grande agilité lui permettant de grimper partout et de sauter dans tous les sens, en surveillant toutefois son endurance. Et vous allez passer beaucoup de temps à escalader des trucs et des machins, comme la Tour Sombre de Barad-dûr  ou les arbres de la Forêt Noire de Mirkwood.

Mais tout est bien indiqué (le syndrome de la trace jaune, ou blanche, a encore frappé), des rebords auxquels s’agripper aux murs pouvant être grimpés verticalement ou parcourus horizontalement. Côté infiltration, Gollum peut aussi exploiter ses sens et voir ainsi les ennemis alentours, comme obtenir des indices visuels sur le chemin à suivre ou les objets intéressants à utiliser. Et les buissons comme les zones d’ombre lui permettent de rester invisible des ennemis (même s’ils vous poursuivaient la seconde d’avant…), à moins de préférer nager sous l’eau. Lancer des pierres est également un bon moyen de détourner l’attention des gardes. À défaut, vous pouvez parfois les surprendre par derrière pour les étrangler. Enfin, le titre cherche à varier son gameplay, sinon très répétitif, avec quelques phases totalement différentes et bienvenues, comme des puzzles à résoudre, mais semblant parfois de nouveau dater d’une autre époque. On peut ainsi discuter de l’intérêt des quêtes Fedex, ou de celles bien peu pratiques demandant de guider un compagnon à distance. Et que dire des DLC payants juste pour quelques annotations, emotes ou entendre les elfes parler en Sindarin, des options qui devraient être d’office intégrées au jeu ?

N’en déplaise aux rageux, pour répondre à notre question première, je ne trouve pas qu’il n’y ait rien à récupérer dans ce Gollum, et je n’ai pas détesté y jouer. Imparfait, oui, il l’est indéniablement et considérablement. Il semble ne pas être achevé et avoir été conçu il y a plusieurs années de cela. Il a encore de gros progrès techniques à faire avant de pouvoir être fréquentable. Quand bien même, il faudra accepter de faire avec une IA plus que limitée et un gameplay certes varié mais malgré tout répétitif, daté et à la maniabilité hasardeuse. Mais si vous êtes fan de l’univers de Tolkien et parvenez à passer outre, le personnage de Gollum et l’histoire qui vient étoffer l’univers du Seigneur des Anneaux, peuvent valoir de faire un petit effort, à condition que les patchs promis remplissent efficacement leur office, bien entendu, et que le prix soit sérieusement revu à la baisse.

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