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Vengeful Heart

Développeur : Salmon Snake, Elmo Mustonen, Hanuli
Date de Sortie Prévue : 27 aout 2020

Le cyberpunk est mort. Le genre a perdu de sa force revendicatrice et politique. Au fil des années il s’est muté en une espèce d’emballage rétrofuturiste nostalgique bizarre pour polar noir. L’objectification et le commerce des corps est remplacé par des fantasmes de puissance et de cybernétisation ; l’ostracisation des minorités et les cataclysmes socio-environnementaux sont devenus un cadre de misery-porn.

Vengeful Heart est une visual novel à l’esthétique PC-98. Elle est toute jolie avec son air d’anime des années 90 et ses couleurs pastels. C’est aussi et surtout une histoire cyberpunk et malgré ma diatribe du paragraphe précédent, je l’ai aimée.

La protagoniste se nomme Josephine. Elle est ingénieure dans la distribution urbaine d’eau potable et elle réalise du jour au lendemain que les intérêts de son PDG playboy sont incompatibles avec ceux des habitants du HLM qu’elle habite. Crise de l’eau, expulsions de masses, violences policières – et l’optimisme d’une communauté autonome enclavée qui essaie de survivre face à tout a et qui esquisse un début de révolte.

Les personnages de Vengeful Heart vivent au milieu d’un statut quo violent et réaliste ancré dans les angoisses sociales, écologiques et économiques contemporaines. En jouant j’ai enfin retrouvé un cyberpunk malaisant, loin de l’onirisme que Blade Runner a imposé et que ses successeurs-copieurs ont établi en fantasme.

Le jeu présente un pixel art précis et plaisant, aux couleurs pastels désaturées qui rappellent le béton. Les influences de la PC-98 sont assumées jusque dans les épaisses marges de l’écran remplies de motifs de tuyauteries – marges que j’espère voir le jeu final utiliser autrement que comme un simple gimmick. Que le studio les remplisse d’animations et de bidules interactifs.

Souci : ce pixel art précis ne laisse pas le droit à l’erreur. Chaque imperfection, chaque accident dans l’anatomie des personnages devient criant. Le jeu prend parfois une saveur amateure. Saveur que l’on ressent aussi dans l’écriture et l’interactivité. Un certain manque de style et de rythme dans les dialogues qui s’éternisent. Une histoire sur laquelle on n’a pas de prise (malgré deux fins différentes prévues par les développeu.rs.ses de Salmon Snake Games. Je me pose la question de comment les choix seront intégrés, j’ai joué une grosse demi-heure sans en faire aucun. La démo est une kinetic novel.)

Certaines idées sont terriblement clichées, et l’amateurisme des graphismes le souligne. Les médias corporatistes, par exemple : le trait est cynique mais manque de finesse. J’avoue avoir parfois soupiré. Mais la passion transpire des images et gomme la plupart des maladresses. À la fin de cette démo, j’étais content d’apprendre que le développement continuait et que la date de sortie n’était pas pour dans bien longtemps (Vengeful Heart est sorti le 27 aout dernier).

Vengeful Heart ne retournera pas des baraques comme Cyberpunk 2077. C’est une perle discrète, très amateure, mais qui transpire d’âme et qui cache derrière son air de petit jeu sans prétention une belle tentative de faire revivre le cyberpunk en retournant à une fiction dont le coeur est la lutte.

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Ade.Breg

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