Les affaires sont les affaires.
Rapide Critique
They Always run
Développeur
Alawar Premium
Éditeur
Alawar Premium
Date de Sortie
20 octobre 2021
Prix de lancement
19 €
Testé sur
PC
Un saloon poussiéreux, un étranger attablé et calme. Quatre hommes s’approchent et lui font comprendre qu’il n’est pas le bienvenu. Le ton monte, des éclairs d’acier fendent l’air, deux importuns s’effondrent et un troisième peine à se remettre d’un coup de pied en plein visage. Mais le quatrième est plus malin, il se lance sur l’étranger dans son dos. Et il s’écroule aussi, surpris par un bras mécanique qu’il n’avait pas vu venir et qui surgit d’entre les omoplates du buveur silencieux. Trois lames sont rangées, trois bras regagnent le secret du poncho, et l’étranger sort du saloon sous le regard inquiet du propriétaire.
Cette scène restera gravée, car elle est l’essence de la promesse de They Always Run, un western spatial où l’on incarne un chasseur de primes « Trois Bras » à la poursuite de son passé et des pires gredins de la galaxie. Des combats en sous-nombre, des contres assassins, des roulades, et un troisième bras bien pratique pour projeter des ennemis ou tout projectile permettant de gagner du temps avant le prochain assaut, tous les éléments de la bagarre classieuse sont là. Mais cette scène restera aussi gravée car le reste du jeu ne lui rend malheureusement pas hommage. Si They Always Run fourmille d’idées sur le papier, l’exécution de ces dernières et la finition globale du jeu le font plus ressembler à un prototype qu’à un jeu pleinement fignolé. Esquives, contres meurtriers, plate-forme dynamique, assassinats, la palette d’actions proposées au joueur est immense, certainement un peu trop étant donné le manque de soin – ou de moyens, sans doute – accordé au ressenti de chaque coup, à l’impact de chaque blessure reçue ou à la tension de chaque course-poursuite. On traverse alors des niveaux au level design dessiné sur papier calque, en enchaînant des combats et des phases de plate-forme au rythme peu maîtrisé, lors d’une aventure qui s’étire inutilement en longueur, tant les situations et les ennemis se répètent avec des couleurs différentes. Si They Always Run peut à l’origine se présenter comme un héritier du furieux Katana Zero, son exécution fait malheureusement pâle figure face à un type de jeu qui réclame un sens d’orfèvre du détail, du rythme, de la précision et du feeling.
En ajoutant une narration laborieuse et l’obtention de nouveaux pouvoirs qui ne modifient en rien l’enjeu ou l’appréhension de chaque niveau – aucun pouvoir ne permet d’accéder à de nouvelles zones ou de favoriser l’exploration – , le studio russe Alawar a peut-être eu les yeux plus gros que le ventre. Mais si manette en main They Always Run s’oublie très vite, sa direction artistique radicale et peu fréquente dans ce type de productions – en tout cas moins fréquente que le Saint Pixel Art – imprime fort le fond de notre rétine. They Always Run propose des décors peints magnifiques, où le moindre coup de pinceau un peu épais rend les carcasses de vaisseaux, les ruines désertiques ou les villes du futur absolument délicieuses pour les yeux. Le soin apporté à l’ambiance de chaque niveau est assez vertigineux, et les animations du héros et des adversaires parfaitement en phase avec les arrière-plans picturaux. Et c’est doublement dommage de voir autant de ressources et de talent injectés dans une direction artistique si brillante mais trahie par une expérience de jeu complètement diluée.
Alors si vous permettez, je vais garder précieusement en tête l’introduction de They Always Run, et rêver d’un futur jeu qui associera avec succès la beauté de ses décors à un gameplay de chasseur de prime aussi fatal et précis que jouissif. Parce que des prototypes pareils, on en croise pas tous les matins.