Le passé est enfin respecté.
Critique
Metroid Prime Remastered
Développeur
Retro Studios
Éditeur
Nintendo
Date de Sortie
9 Février 2023
Prix de lancement
39.99 €
Testé sur
Switch
Sorti quasiment immédiatement après son annonce durant le Nintendo Direct du 8 février, le remaster de Metroid Prime fut une véritable surprise pour mon petit cœur meurtri de gamer. Faut quand même avouer que le dernier opus de la série (à savoir Metroid Prime 3 : Corruption) est sorti en 2007 et qu’on attend évidemment un nouvel épisode de pied ferme dont on n’a eu aucune annonce officielle depuis maintenant presque 6 ans.
Alors oui, on a eu Metroid Dread, donc la série n’était pas abandonnée, mais chez Nintendo on fait bien le distinguo entre les Prime et les autres jeux, et cette précision me semble importante.
Prime à la reprise
Bref, j’ai dégainé le porte monnaie comme tout bon iencli, en me disant, qu’au pire ça fera montre d’un intérêt porté à la franchise et peut-être que ça secouera les puces du big N pour nous montrer que Metroid Prime 4 est toujours en route (mais fait état d’une création difficile semble-t-il). Je m’attendais à une version HD de la version Wii (dans la fameuse trilogie du Metroid du samedi, pour les connaisseurs) avec éventuellement des contrôles adaptés aux spécificités de la Switch, mais il s’avère qu’on a droit à mieux. Ce n’est pas juste une couche de peinture ou un lissage des textures, non, le jeu semble avoir été entièrement retravaillé pour être digne de se présenter après 21 ans d’absence. Il a mis un costume sur mesure, a payé des artistes et un traiteur et on est en droit d’être considéré comme invité à la fête d’anniversaire où tout le monde a droit au gâteau. Faut payer le ticket d’entrée 40 balles, c’est un poil cher mais l’original Game Cube ou la trilogie sur Wii sont beaucoup plus chers avec une disponibilité aléatoire (et un état qui l’est tout autant). Simplement, une fois les portes de la réception refermée, je ne savais pas encore que le piège était là, prêt, alléchant.
2002
On va revenir 21 ans en arrière, Metroid Prime vient de sortir sur Game Cube. Je ne connaissais pas trop la série, j’étais un poil jeune pour le premier de la série, je n’ai pas eu de Gameboy pour le 2 et Super Metroid, je n’ai eu que l’occasion de le faire par des moyens détournés (et au clavier en plus quelle hérésie, quand j’y repense). Comme chacun le sait le Game Cube ne brillait pas par sa surabondance de jeux, et à l’époque j’avais grand faim, donc je sautais un peu sur tout ce qui passait. Faut dire que la PS1 était « un peu » en fin de vie et que dans la Grande Guerre des Consoles de l’an 2000, j’avais dû faire le choix raisonnable de prendre le p’tit cube rigolo, plutôt que l’intimidante PS2 pour laquelle il fallait un troisième dan de karaté, ou la Xbox où il fallait une médaille olympique d’haltérophilie. Je digresse, pardonnez-moi. Bref, Metroid Prime sort, je l’achète, et j’y joue. L’onboarding est fantastique, la découverte de Tallon IV est formidable : grâce au scan de l’environnement qui est une invention géniale de cette série (reprise ensuite dans Bioshock par exemple) et qui permet d’obtenir des infos sur la faune et la flore, mais aussi de lire les différents messages laissés par les Chozos et les notes et indications de plus en plus paniquées des Pirates de l’Espace sur leurs terminaux. De l’environmental storytelling au premier degré.
Le trope du « j’ai tous mes pouvoirs au début du jeu mais je les perds en 5 minutes pour les récupérer en 10h » est là aussi dans sa, sinon première, au moins plus mémorable incarnation. Une façon perfide mais idéale pour donner une vision de ce qu’il sera possible de faire dans le jeu un peu plus tard. Le reste du cahier des charges de Metroid est bien sûr présent, récupération de différents objets permettant de passer des endroits impossibles avant, comme dans un Metroidvania (AH?) en somme. La vue à la première personne permet de jouer avec les scans environnementaux et différents filtres afin de rendre l’exploration en 3D plus intense, motivante et gratifiante. Le lock à la visée des ennemis permet aussi de rendre les combats lisibles et de « jouer » avec les créatures et monstres en les esquivant et l’apprentissage des différentes rencontres, de leurs atouts et de leurs faiblesses suit une courbe de difficulté relativement satisfaisante. Le joueur se laisse prendre.
Les Mines de Phazon
En 2002, je me suis cassé les dents sur les mines de Phazon, un passage où la difficulté grimpe en flèche, les ennemis sont plus retors, plus nombreux, nécessitent de changer plus souvent de type d’armes, et de manière générale frappent plus fort. La musique est plus pressante, stressante, on sent qu’on n’est pas chez mamie, et qu’un fauteuil douillet avec moult madeleines et un chocolat chaud ne nous attend pas au détour d’une coursive. Les points de sauvegarde sont plus espacés et on doit subir de nombreux affrontements et résoudre des énigmes sans pouvoir véritablement recharger sa vie. À cette époque, et après plusieurs heures perdues (du moins c’est l’impression que j’avais), j’ai laissé tomber. Refaire le puzzle de la colonne tournoyante 3 fois, c’était trop, surtout pour se faire pourrir juste après par les élites Pirates tout frais sortis de leurs bocaux. Je n’étais pas d’humeur , ou je n’avais pas l’envie, je me suis découragé. Il est probable qu’un autre jeu plus « sympa » me soit tombé dessus à l’époque, toujours est-il que j’ai revendu Metroid Prime et que je n’y ai plus jamais véritablement touché depuis. Le 2 m’a semblé encore plus hostile, et le 3, ben je l’ai fait parce que la Wii, et la visée à la wiimote apportait une véritable nouveauté dans la façon d’aborder le jeu (mais ça faisait mal au poignet). Oui, j’aurais dû rendre mon badge de gamer à ce moment-là, et marcher dans la honte et l’opprobre le reste de ma vie, mais bon, eh, hein, voilà…
9 février 2023
Donc me voici après avoir payé l’écot, tout frais pimpant à pousser des « oh », et des « ah » lors de l’arrivée sur la frégate, les premiers scans, la fuite, l’arrivée sur Tallon IV, avec cette musique planante prenante. Le jeu est conforme à mes souvenirs initiaux, et le traumatisme des mines de Phazon est loin. Tout est cependant plus beau, plus net, mieux éclairé, mais les sensations de jeux sont quasiment les mêmes qu’à l’époque, je remets les grosses chaussures de Samus et je m’y sens bien. On peut tout de même modifier les contrôles, et profiter de 4 modes, dont l’original Game Cube, et deux configurations avec le gyroscope, mais j’ai préféré passer le jeu avec le mode twin stick, bien plus pratique en mode portable. Après quelques heures, je ne me souviens plus pourquoi je n’avais jamais fini ce jeu et ne m’attends pas à, cette fois-ci, le laisser tomber à nouveau et ne plus y toucher pendant 20 ans. Et puis les mines de Phazon arrivent. Mais j’en fais une affaire personnelle. D’autant que là, tintin pour la revente, j’ai pris la version dématérialisée ! J’avance prudemment, je refais le fichu puzzle de la tour pivotante, et j’avance, comprenant que je suis piégé. Impossible de laisser tomber, et impossible de perdre, j’ai 20 ans de frustration à exorciser, alors j’avance péniblement, prudemment. Chaque combat contre les Pirates de l’Espace est une bataille contre moi-même, je perds beaucoup de vie, mais j’avance. Je sais qu’une salle de sauvegarde n’est pas loin mais elle l’est tellement en réalité. Je cheese les bestioles électriques près de l’ascenseur pour remonter ma barre de vie, chaque petite boule bleue est un déchirement, les boules rouges sont un soulagement, les boules jaunes une joie. Et puis le Pirate d’Elite, scanné, super missilisé, battu. La salle de la Bombe de Puissance, avec la barre de vie clignotante, le drone invisible, les arcs électriques à éviter dans un labyrinthe hostile et enfin, le déverrouillage de la salle de sauvegarde. Je suis passé. J’ai passé ce moment, enfin. Mon moi d’il y a 20 ans est soulagé, et un peu frustré quand même, parce que eh, au final ça allait, hein, va pas pigner. Ce moment enfin passé, la suite du jeu s’offrait enfin à moi (enfin s’offrait, elle me tabassait quand même un peu avec une batte, mais bon), et malgré quelques dernières difficultés, et un système de checkpoint absent, j’atteins enfin la fin du jeu avec une certaine satisfaction et une envie d’en découdre à nouveau avec le reste de la série.
Metroid Prime Remastered est toujours un excellent jeu, qui a bien vieilli malgré quelques soucis inhérents à son concept initial. Il faut faire beaucoup d’allers-retours dans les endroits déjà visités, et la vitesse de Samus est parfois un poil lente. On manque un peu de tutos sur certains pouvoirs (notamment la balle turbo) mais c’est normal, il faut faire des expériences. En tout cas, pour ma part c’est un gros coup de cœur, mais c’est probablement lié à mon expérience personnelle avec l’original. En tout cas, il fallait que ça sorte (et puis il faudrait que les autres ressortent aussi, j’ai pas envie de payer un rein pour jouer à Metroid Prime 2, nom d’une pipe). Gardez à l’esprit cependant qu’il s’agit vraiment du même jeu qu’avant, avec un confort relatif lié à son utilisation portable, des contrôles adaptés, et évidemment, une refonte graphique mais le jeu est exactement le même en terme de contenu que la version originale donc si vous avez encore le Mini DVD et le Game Cube à portée de main (ou la trilogie sur Wii) et que vous y jouez régulièrement, ce n’est pas vraiment un indispensable.
Metroid Prime Remastered est toujours un excellent jeu, malgré quelques soucis liés à son statut de premier Metroidvania en 3D. Cependant il s’agit vraiment du même jeu qu’en 2002, donc si vous avez encore l’original, l’achat ne s’impose pas forcément. Par contre il est important, je pense, si vous voulez que la série perdure, d’en faire écho, et d’en parler, d’en vanter les mérites. C’est un jeu phare dans l’histoire du jeu vidéo et son héritage se ressent encore aujourd’hui.