Critique

System Shock

CactusSinger
Publié le 24 juin 2023
System Shock

Développeur

Nightdive Studios

Éditeur

Prime Matter

Date de Sortie

30 mai 2023

Prix de lancement

39,99 €

Testé sur

PC

Pionnier des Immersive Sim, de Deus Ex à Dishonored, Prey, et bien sûr la série Bioshock, qui ira même jusqu’à le citer dans son titre, le System Shock original est sorti il y a presque 30 ans maintenant. Malgré une version enhanced sortie en 2015, l’arrivée d’un remake complet est une opportunité parfaite pour découvrir, dans les meilleures conditions possibles, ce titre majeur dans l’histoire du jeu vidéo.

Sorti en 1994, System Shock premier du nom est considéré comme l’inventeur d’un genre défini par la suite sous le nom d’« Immersive Sim ». Un titre qui, malgré un succès commercial limité à sa sortie, aura marqué les esprits, et surtout fortement influencé le futur du jeu vidéo. Se passant en 2072 dans un univers Cyberpunk, vous y incarnez un hacker emmené de force sur la « Citadel », une station spatiale ultra-moderne en orbite de Saturne, afin de retirer tout protocole de contrainte éthique à SHODAN, l’Intelligence Artificielle gérant la station. En remerciement, vous vous verrez installer des implants neuronaux cybernétiques militaires avant d’être plongé dans un sommeil artificiel plusieurs mois. Le réveil ne sera pas pour autant plus facile, et vous vous rendrez rapidement compte que quelque chose ne tourne pas rond. Les confrontations quasi immédiates avec un robot tueur et autre zombie mutant finiront par vous mettre définitivement la puce à l’oreille. Il se trouve que, pendant votre longue sieste, SHODAN a décidé de prendre son indépendance, et dans la foulée d’éradiquer la race humaine. Sacrée gueule de bois…

The Shodan is about to begin

Tout ce contexte vous est montré en quelques minutes seulement. System Shock réussit à vous mettre en effet très vite dans l’ambiance, sans fioritures, ni long discours, ni fenêtres de tutoriel intempestives. C’est immersif dès les premiers instants, vous êtes très vite lâché dans la Citadel, et c’est à vous de vous débrouiller, mis à part quelques petites aides contextuelles pour vous mettre sur les rails au début du jeu. Et force est de constater que ça fonctionne parfaitement, on est tout de suite happé dans le jeu et son univers. C’est d’ailleurs un des points les plus marquants dans ce System Shock, l’ambiance du titre est en effet une vraie réussite. En grande partie grâce à la présence de SHODAN, probablement un des antagonistes les plus marquants du jeu vidéo, et ce, avec finalement peu de lignes de dialogues. Non seulement ceux-ci sont bien écrits, mais le doublage, ou plutôt le mixage sur sa voix, est excellent. L’intelligence Artificielle sait se montrer tantôt joueuse, tantôt sarcastique, et très souvent sait se faire menaçante, un domaine dans lequel elle excelle particulièrement. Et surtout, il faut bien comprendre que SHODAN est partout. Elle incarne la Citadel elle-même, elle possède des yeux partout et est toujours là pour vous mettre des bâtons dans les roues.

Si l’ambiance si particulière du titre est bien présente, on se rend très vite compte que ce remake fait le choix de la fidélité à l’œuvre originale. Alors bien évidemment, le visuel est mis au goût du jour, sans être à couper le souffle, le jeu est très propre, plutôt beau malgré des couleurs parfois un peu agressives, et possède un effet légèrement pixelisé au niveau des textures qui fonctionne parfaitement bien. Au niveau du gameplay, là aussi, on y trouve une remise au goût du jour par rapport au jeu de 1994 qui lui peut paraître un peu intimidant au niveau de ses commandes et de son UI pour les nouveaux joueurs. Ici, on retrouve un gameplay habituel pour un FPS, notamment la possibilité de se pencher sur les côtés afin de tirer quelques cartouches bien placées sans pour autant quitter sa couverture. Attention cependant, si le titre repris ici date des années 90, les gunfights eux ne sont pas ceux d’un boomer shooter (ou fast-fps pour être moins blessant envers de nombreuses générations de joueurs) et ne sont pas d’une très grande intensité. La prudence est de mise et mieux vaut rester à couvert jusqu’à la mort complète de votre adversaire. On apprend d’ailleurs vite à y aller doucement en faisant attention à ne pas se précipiter sur l’ennemi et à jeter un œil à chaque coin de couloir.

Fidèle à lui-même

C’est au niveau du game et level design que NightDive Studios reprend quasiment à l’identique le System Shock original. On retrouvera des niveaux labyrinthiques où il faudra trouver le bon chemin afin obtenir des clés pour débloquer certaines entrées. C’est assez intimidant au départ, mais les niveaux sont dans l’ensemble bien fichus et l’on s’y repère assez vite. D’autant que l’on débloque rapidement des raccourcis permettant de traverser le niveau rapidement (non, ce n’a pas été inventé par les jeux estampillés « Souls »). C’est d’ailleurs un point important, car la progression n’est pas complétement linéaire. Si l’on part de l’étage le plus bas pour arriver en haut, il ne s’agira pas d’y aller non plus en ligne droite, avec certains niveaux donnant accès à plusieurs autres étages, ou inversement des niveaux, ou portions de niveaux, accessibles seulement par certains étages, ou sous certaines conditions. Mais, il faudra également faire quelques allers-retours entre les étages, que ce soit pour retourner se soigner, se recharger en énergie, ou pour résoudre certains objectifs et accéder à des zones inaccessibles à moins d’avoir le bon objet, ou atteint une condition spécifique, un petit côté Métroidvania en somme.  

Comme à l’époque, on ne trouvera pas d’indicateurs d’objectifs et le jeu ne vous indique pas directement la marche à suivre. Il faudra donc bien penser à relire les logs audios et écrits, enregistrés dans un menu dédié, afin d’y trouver les informations nécessaires sur votre prochain objectif, et comment le mener à bien. Un journal de quêtes aurait cependant pu être utile pour au moins indiquer votre objectif global du moment et éviter au joueur de ne plus savoir quoi faire. Heureusement cependant, les logs ne sont pas si nombreux, et à quelques exceptions près, on trouve assez rapidement ce que l’on doit faire. On aurait aussi apprécié avoir la possibilité de pouvoir placer des marqueurs personnalisés sur la carte pour mieux naviguer dans les niveaux.

Au cours de vos pérégrinations dans la Citadel, vous ramasserez tout un tas d’armes et d’objets. Chaque arme possède différents types de munitions qui seront plus ou moins efficaces selon le type d’ennemi, et vous aurez la possibilité d’utiliser tout un tas de consommables pour vous soigner ou booster vos capacités. Le problème de ce nombre élevé d’objets, combiné à un inventaire à l’espace limité, est que l’on se retrouve rapidement à ne plus savoir où stocker son barda, et ce, malgré la présence d’un espace de stockage accessible à chaque étage, celui-ci étant en effet encore plus limité que votre propre inventaire. Pire encore, certaines armes sont même trop grandes pour y être stockées. Heureusement, les objets posés au sol ne disparaissent pas, on se retrouve donc à utiliser la bonne vieille méthode du « je pose tout mon bordel sur le sol comme un malpropre », aussi appelée « la banque Tristram à la Diablo premier du nom », très d’époque en somme.

🎵 451 je t’aimeuuuuh 🎵

Ce qui marque en jouant à System Shock, c’est surtout le nombre d’idées que l’on retrouve dans des jeux sortis bien plus tard. En plus des quelques exemples cités ci-dessus, on trouve notamment les chambres de résurrection. On en trouvera une par niveau, et une fois activées, elles vous permettront d’échapper au gameover si vous vous faites tuer dans le niveau en question, vous ramenant instantanément à cette chambre. Un principe qui sera repris plus tard dans Bioshock avec les Vita Chambers. Autre spécificité de System Shock qui vient agrémenter son gameplay, la possibilité d’équiper différents implants cybernétiques à son interface neuronale. On y trouvera des implants venant « justifier » la présence de votre UI, comme la présence d’un indicateur de santé ou une mini map, mais d’autres plus actifs, vous permettant par exemple de scanner des ennemis vous donnant ainsi plus d’informations sur leurs forces et faiblesse, ou encore la possibilité de dresser un bouclier énergétique autour de vous absorbant un pourcentage des dégâts infligés au prix d’une consommation d’énergie accrue. Un principe retrouvé plus tard dans l’incontournable Deus Ex, qui poussera le principe encore plus loin. Et bien évidement, si l’on parle d’éléments repris plus tard, on ne peut pas ne pas mentionner un des clins d’œil les plus retrouvés dans les jeux depuis 30 ans maintenant. Je parle évidemment du code 451, celui ouvrant la première porte fermée de System Shock, et qui se retrouve dans la quasi-totalité des jeux se voulant d’inspiration Immersive Sim, et même d’autres genres.  

Notez tout de même que l’on était seulement aux esquisses d’un genre, et que l’on reste loin d’un niveau de liberté d’approches des situations d’un Deus Ex par exemple. Un côté qui sera encore amélioré dans System Shock 2, dont on espère grandement un remake du même tonneau. Comme dit plus haut, le jeu garde ses racines dans les années 90, de ce fait, la difficulté pourra en surprendre quelques-uns, d’autant que le jeu ne vous tient pas par la main. Cependant, tout devient plus simple quand on commence à mieux le prendre en main et à comprendre ses subtilités. Par exemple, activer les chambres de résurrection tôt dans un niveau vous permettra de pouvoir cheeser le système, d’autant plus si vous avez un caisson de soin disponible à proximité. Heureusement, et c’était déjà le cas à l’époque, la difficulté est modulable. Vous pouvez en effet vraiment choisir l’expérience voulue en sélectionnant le niveau de difficulté de 4 aspects différents du jeu, les combats, les puzzles ou encore les passages dans le Cyberspace. Une modulation de la difficulté par aspect que l’on aimerait retrouver dans plus de jeux modernes… 

Outre le gameplay classique, vous serez également amené à visiter le Cyberspace, ce qui vous permettra de débloquer l’accès à une portion d’un niveau. Probablement la partie la plus étrange, et la moins réussie, de ce remake. Visuellement proche d’un TRON sous acide, il s’agit d’un genre de shooter 3D en apesanteur où il vous faudra éliminer les différentes défenses informatiques placées ici pour protéger contre toute intrusion d’un hacker. Pas vraiment passionnant, et de plus, passage obligatoire pour progresser. Je vous conseillerais presque de mettre la difficulté de ces phases en facile pour les expédier. Même si une fois compris, on arrive tout de même à avancer sans trop de problèmes, c’est tout de même frustrant de devoir recommencer une phase entière alors que l’on préférerait retourner se promener dans la Citadel.

Ce System Shock est donc un remake extrêmement efficace et clairement le meilleur moyen de découvrir ce monument du jeu-vidéo. Si c’est ce genre de qualité que peut insuffler Nightdive Studios dans ses productions, on se met alors à rêver d’un remake de System Shock 2, et qui sait, espérer que le 3ᵉ opus, supposément en production, ou du moins pas encore complétement enterré, soit du même acabit.

 

S’il fait preuve d’une modernité bien venue visuellement et dans son gameplay, bien qu’un peu rigide, ce remake du classique System Shock ne fait cependant quasiment aucune concession sur son level et game design d’époque, ce qui ravira certes les vieux de la vieille, mais les niveaux labyrinthiques, la difficulté et le peu d’indications notamment, risquent de sacrément déstabiliser les joueurs néophytes de la série ou ceux n’ayant pas connu les jeux vidéo de cette époque. Il n’en reste pas moins que ce System Shock est une quasi totale réussite. Un excellent remake qui vous fera passer un excellent moment, pour peu que vous y soyez réceptif. En espérant l’arrivée de sa suite maintenant…

Stardiver
Stardiver

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