Exposition : La Gaîté Lyrique « Joue le Jeu » !

La Gaîté Lyrique est un lieu de diffusion et de création dédié aux arts numériques. Chaque été, le bâtiment s’habille d’une thématique contemporaine. Si les chaleurs estivales de 2011 étaient placées sous le signe du skateboard, cette année l’ancien théâtre nous a proposé de « jouer le jeu » à travers un parcours éponyme, le bien nommé « Joue le jeu ». Pour les vacanciers et autres absents, voici une petite retrospective de ce que vous n’auriez surtout pas dû manquer!

Joue le jeu

La publicité vous ment! Prenez la campagne élaborée pour Joue le jeu… elle accomplit le tour de force de faire passer pour kitschissimement ringard un mode d’exposition aussi avant-gardiste que celui de Joue le jeu. En avance sur son temps, le parcours qu’a proposé la Gaîté Lyrique l’est clairement. Loin des structures classiques qu’imposerait un musée traditionnel, les étapes du cheminement dans Joue le jeu varient selon nos performances à différents ateliers disséminés dans le bâtiment. Concrètement, l’ordre d’accès aux différentes oeuvres est fonction des réussites et des échecs à différents mini-jeux. Une idée d’autant plus intéressante que la structure du bâtiment n’est initialement pas adaptée à une exposition typique. On se retrouve donc, de manière totalement justifiée, à grimper et dévaler les énormes escaliers du théâtre durant toute la visite.

Cette exposition-qui-n’en-est-pas-une a été conçue par un duo montréalais, ayant déjà élu résidence à la Gaîté: Kokoromi, un collectif de développeurs de jeux expérimentaux et TAG, un centre de recherche en technoculture, art et jeux. Chez TAG, c’est sa co-fondatrice, Lynn Hughes qui a fait le déplacement. Elle a notamment participé à la conception de l’excellent Propinquity, un jeu numérique performatif entre la danse et le combat, présenté lors du vernissage. Les deux derniers commissaires d’exposition sont membres de Kokoromi: Heather Kelley et Cindy Poremba. Le collectif est notamment connu pour Super Hypercube, finaliste de l’Indiecade 2011. Le jeu a été réalisé en collaboration avec Polytron, le studio de Phil Fish, lui-même membre du collectif.

Joue le jeu a également accueilli différents évènements, ponctuels, autour de cette même thématique tels que des colloques, des projections ou encore des parties du célèbre Johann Sebastian Joust. Le créateur de Fez a d’ailleurs, dans ce cadre, lui-même honoré la projection du très attendu Indie Game: The Movie de sa présence. Les jeux de la résidence estivale sont relativement hétéroclites et s’inscrivent dans trois grands pôles: les jeux géants, les arcades et le méta-jeu modulant le parcours. Les jeux géants constituaient pour la plupart des installations numériques ludiques et artistiques. Les arcades proposaient de jouer à des jeux indé en avant-première. Enfin, le méta-jeu, annoncé comme faisant partie des jeux géants, modifiait les étapes de notre parcours.

The building is…

La baseline de Joue le jeu constituait une référence, peu subtile, à Magritte: « ceci n’est pas une exposition ». La justesse de cette affirmation tient essentiellement dans le méta-jeu « The building is… » réalisé par les londoniens de Hide&Seek. Le concept a été construit autour d’une idée génialement tordue: le bâtiment est vivant (et cinglé!). Lorsque l’on débarquait, la première information qui nous était donnée était l’humeur de la Gaîté: anxieuse, curieuse, extatique… la petite dame, plutôt lunatique, ne demandait qu’à changer de disposition. La scénarisation et la justification du méta-jeu modulant le parcours étaient particulièrement originaux et de très bon goût. Il est d’ailleurs dommage que sa mise en scène n’ait pas été poussée plus loin.

Chaque jeu proposé se jouait à deux et reposait sur la communication avec le bâtiment à travers l’un de quatre des cinq sens: l’ouïe, l’odorat, la vue et le toucher. A la fin de chaque étape, une valeur et un picto étaient attribués au binome selon sa performance. On commençait par l’ouïe. Pas tout à fait un jeu, l’interaction consistait à appeler la Gaîté, par téléphone, puis, selon le timbre de la voix de son interlocuteur, l’ancien théâtre l’invitait à accéder à l’un des étages. Le jeu visuel proposait au joueur de dévier un laser rouge projeté depuis un mur à l’aide de miroirs de manière à lui faire atteindre certains points de la pièce. Le jeu centré sur l’odorat consistait à imprégner une balle de ping-pong de notre odeur (beurk) puis, à deux, de la faire évoluer à travers un parcours d’obstacle à l’aide d’un souffleur à pompe manuelle. Probablement le moins réussi des quatre, ce mini-jeu
proposait malgré tout un bon challenge physique. Enfin, le jeu basé sur le toucher était une sorte de Simon-like géant. Sur un les murs d’un petit couloir en coude, de gros boutons colorés lisaient une séquences lumineuse et musicale à reproduire simultanément par les deux joueurs. Lorsque la séquence complète était reproduite, un énorme bouton de mousse rouge devait être tabassé jusqu’à la victoire. Bien que la dimension communicationnelle puisse sembler confuse, les concepts restaient très intéressants et la progression agréable.

The building is… ne s’arrête pas à ses quatre jeux. La feuille de score remplie, les joueurs étaient invités à rentrer leurs données sur un énorme écran plat tactile vous délivrant un profil: tendre architecte, bureaucrate extrême, polichinelle colérique… Les performances n’étaient pas sanctionnées par une valeur chiffrée, mais par des archétypes originaux. Cette évaluation plus stylistique que technique était particulièrement bien pensée pour questionner le rapport entre art et jeu. La Gaîté recherchait constamment de nouveaux profil. Lorsque l’on possédait le profil demandé, on pouvait accéder au coeur du bâtiment pour y modifier son humeur. Secret bien gardé de ceux qui l’ont atteint, ce coeur consistait en un amas de câbles électriques et autres tubes en plastiques semblables à un mur de vaisseau spatial futuriste éventré. On devait alors y plonger les deux mains pour jouer avec des masses à la texture louche, non-identifiées. Il est dommage que ce reward final soit un peu random, au sens où seule la chance peut vous permettre d’obtenir le bon profil au bon moment (ou une sacrée patience), mais rien de très étonnant pour un bâtiment qui se présente en expliquant « Je suis la Gaîté Lyrique. Je suis devenue folle, un temps, mais maintenant, je vais mieux ».

Les arcades

Tandis que le méta-jeu d’Hide&Seek nous baladait d’un bout à l’autre de la Gaîté, d’autres jeux se plaçaient sur notre route. Les arcades, comprenant deux grands espaces, Peek et Les Nouvelles Arcades, proposaient plusieurs jeux vidéo très attendus en avant-première. Cette partie du parcours replaçait le jeu vidéo, à proprement parlé, au coeur du propos. Cette ligne, constituée de titres pour la plupart très innovants et indépendants, formait l’extrémité gaming du double axe art et jeu survolé par Joue le jeu.

Les Nouvelles Arcades nous proposait de tester l’excellent Ibb & Obb, toujours en développement à l’heure actuelle. Développé par l’Ibb & Obb Team en partenariat avec Codeglue et produit par Sparpweed, ce plateformer coopératif fait parler de lui depuis plusieurs mois. L’idée repose sur un univers en deux parties. Autour d’un axe de symétrie gravitationnel deux environnements se font face chacun communiquant avec l’autre. Si les jeux en coop ne sont pas rares, les jeux possédant un véritable coeur coopératif, conçu uniquement pour la coopération, sont, eux, une minorité invisible. Assez addictif, le level design et sa progression sont très bien pensés et l’ambiance ronde et sucrée fonctionne très bien avec le concept. Un projet à surveiller…

Bien que réputés pour leur lenteur, c’est les suisses qui produiront le jeu de course indé le plus attendu de l’année: Krautscape. Aux commandes d’une voiture volante aux ailes rétractables, deux joueurs s’affrontent en split screen sur un circuit commun. La grosse particularité du titre c’est que le  joueur en tête créer le circuit à mesure qu’il progresse. Un jeu à pur gameplay émergent dans un univers futuriste teinté d’une palette de brasier. Premier jeu perçu lorsque l’on atteignait Les Nouvelles Arcades… l’invitation était très bien choisie.

Fader est l’une des quatre perles qu’on pouvait trouver aux Nouvelles Arcades. Dans une atmosphère de plateformer DOS, le joueur doit faire évoluer plusieurs personnages, se déplaçant simultanément. Les environnements semi-opaques de chaque perso peuvent être superposés de manière à en créer un nouveau permettant aux multiples avatars de progresser. Réalisé par le vieux de la vieille Chris Markis, Fader a participé à l’IGF cette année. Un concept très visuel surprenant pour lequel aucune date de sortie n’a encore été annoncée.

FLX est un projet hollandais développé par Han Hoogerbrugge et Sander Van Der Vegte. Ce jeu de course de coopétition est un peu difficile à appréhender (j’ai vraiment galéré à comprendre ce que je faisais). Différents personnages attachés les uns aux autres par des élastiques doivent avancer dans l’environnement. Le tout se joue sur Kinect, se déplacer dans l’espace permettant de déplacer son personnage. La principale stratégie consiste à se servir des éléments du décors pour freiner les autres joueurs, mais pas trop, de manière à ne pas se bloquer soi-même. Un gameplay très déroutant, qui a quelque chose de désordonné, d’un peu chaotique… ce qui fait son intérêt.

Dans la sélection de Peek, un peu plus mainstream que celles des Nouvelles Arcades, on trouvait Papo y yo, ce jeu dont Skywilly vous révélait la sortie il y a quelques jours. Développé par les québécois de Minority, le titre s’est notamment fait un nom en gagnant le Best Puzzle Game Award l’année dernière à l’E3. Dans ce jeu d’aventure/puzzle, on incarne Quico, un jeune garçon, parcourant les favelas brésiliennes, accompagné de son pas très comode meilleur ami: Monster. Disponible sur le Playstation Store, la partie jouable proposée durant Joue le jeu ne révélait qu’un niveau peu intéressant… Un véritable playtest s’impose.

The Witness est probablement le jeu le plus attendu de la ligne Peek, et pour cause: il est développé  par Monsieur Jonathan Blow, créateur du très célèbre Braid… Mais The Witness n’a pas grand-chose à voir avec son aîné. Ce jeu d’exploration/puzzle en first person prend place sur une île inhabitée pourtant peuplée de constructions humaines. Les quelques énigmes testables à la Gaîté ne révèle pas que très peu l’intérêt du jeu sur le long terme mais l’empreinte poétique dont Blow teinte ses créations est clairement palpable.

Seul jeu disponible dans le commerce présenté à Joue le jeu, Fez est le titre mainstream de cette sélection. Pour ceux qui reviendraient d’un voyage en orbite de plusieurs mois, Fez est un puzzle/plateformer 2D. Par le déplacement de la caméra, le joueur doit modifier ses perspectives  pour atteindre différentes plateformes et ainsi évoluer dans les niveaux. Récompensé par de très nombreux prix, conçu par Polytron dont le fameux Phil Fish, je vous laisse entre les mains de Skywilly pour les détails du playtest. Si le concept est intéressant et la DA particulièrement léchée, il faut admettre qu’après avoir pu jouer pendant plus d’un an et gratuitement à Sky Island, la dimension innovante de Fez perd de son effet. Difficile de justifier de sa participation à cette sélection Peek, bien que son gameplay se prête davantage au jeu sauvage que Papo y yo ou The Witness.

La grosse claque de ce panel Peek est clairement The Unifinished Swan. Développé par des étudiants de l’University of Southern California et le studio californien Giant Sparrow, The Unifinished Swan propose un concept fort et innovant. En première personne, dans un environnement entièrement blanc, le joueur doit lancer des balles de peintures pour dévoiler les contours de l’espace de jeu et ainsi se déplacer. Il s’agit, de loin, du projet le plus atypique de cette sélection, qui promet une très belle expérience. Giant Sparrow vient de révéler un trailer à la Gamescom, il y a quelques jours:

Les jeux géants

Les jeux géants comprenaient toutes les installations interactives gigantesques présentées à Joue le jeu. Certaines, plus proches du jouet que du jeu, n’imposaient pas réellement d’objectif, bien que leur caractère ludique soit évident. Ces oeuvres constituaient de véritables défis pour qui tentait de se lancer dans un discours délimitant le champs de l’art et celui du jeu. Tout comme The building is… interrogeait l’apport du jeu dans les codes de l’exposition, les jeux géants, eux, questionnaient celui du jeu vis-à-vis de l’art contemporain.

Damien Di Fede, le cinquième membre de Kokoromi, a revisitée la chambre sonore de la Gaîté Lyrique. Habituellement réservée à une écoute passive, The Elephant in the room (photo ci-contre) offre à cet espace l’interactivité. La chambre réagit en fonction de nos positions sur les traces d’énormes pattes d’éléphant plaquées au sol. Selon le nombre de personnes placées sur ces silhouettes, des séquences lumineuses et musicales se déclenchent allant d’une musique minimaliste et une ambiance lumineuse tamisée à des samples frénétiques et des flashs de lumières (déconseillé aux épileptiques). Difficile de savoir exactement qui déclenche quoi. Ce manque de compréhension entraîne une difficulté de contrôle un peu frustrante qui ne permet pas réellement de jouer avec la bête indomptable. Néanmoins l’émerveillement que produit l’installation compense en partie cette frustration. Un rapport corps/espace et son/lumière intéressant qui donne à cette pièce confinée et capitonnée une forme d’autonomie troublante.

La crème de la crème des jeux géants était probablement Kit Operette, une sorte de scène théâtrale interactive conçue er réalisée par le collectif canadien Daily tous les jours. Dans une grande pièces close, plongée dans l’obscurité, une vidéo englobant tous les murs ainsi qu’une pièce musicale invitaient les joueurs/acteurs à manipuler certains objets mis en scène sur une estrade: table de ping-pong avec balle et raquettes, cape en plumes, pom-poms, ombrelles, oiseaux en bois, boite à orage…

Un fond musical était lu, accompagnant les vidéos. Lorsqu’un objet entrait en scène, un faisceau lumineux l’éclairait indiquant aux joueurs qu’ils pouvaient l’utiliser. Selon que ces éléments du décors étaient manipulés ou non, des voix s’ajoutaient formant ainsi l’opérette visible et audible par tous les autres participants passifs, en sommes les spectateurs. Directement lié au passé historique de la Gaîté, qui abritait initialement des ballets et des opérettes, Kit Operette est la seule oeuvre posant une nouvelle variable, unique, aux questions soulevées par Joue le jeu: celle du jeu compris comme jeu d’acteur.

Electricity comes from other planets faisait partie de ces installations plus proches de l’expérience esthétique interactive que du jeu. Réalisée par Fred & Company, l’oeuvre proposait de participer à une composition visuelle et sonore émergeant de nos déplacements sur une bande au sol composée de différentes couleurs. Différents blocs lumineux, appelés « planètes », placés en hauteur sur un mur face aux joueurs s’illuminaient en fonction de ces mouvements. Chaque planète dépendait d’une bande interactive différente imposant aux participants de coopérer pour faire émerger une oeuvre complexe. La dimension collective de cette participation constituait la richesse de cette installation particulièrement hypnotique.

Eric Zimmerman, notamment connu pour son livre Rules of Play, et Nathalie Pozzi ont probablement produit l’oeuvre la plus élégante de Joue le jeu avec Interference. Constituée de cinq feuilles d’acier sculptées comme une vue en coupe de cellules organiques, cette gigantesque installation produisait immédiatement un effet wow quand on arrivait devant. L’idée générale repose sur la capture de territoire. Des bouchons étaient disposés dans les trous de la structure. Chaque joueur devait compléter son terrain en volant les pièces d’autres joueurs sans se faire voler les siennes. On entrait rapidement dans un jeu de négociation, qui donnait une vraie dimension sociale à la partie. Malgré tout, les limites du gameplay apparaissaient assez vite, s’imposant d’elles-mêmes. Le concept restait très surprenant, efficace et l’installation formait un objet architectural très intéressant.

Loin d’être l’installation la plus mémorable, Trente pas entre ciel et terre est une marelle pour deux, particulièrement longue, proposant différents challenges de coopération tels que se tenir par la main tout en sautant ou encore sauter alternativement. Réalisé par Heather Kelley et Oscar Barda, l’interface jeu vidéo de la Gaîté Lyrique, le concept, bien que n’interrogeant que très peu la thématique, restait fun et plaisant. Placée à l’entrée du parcours, la marelle offrait aux participants un tour de chauffe pour « se mettre dans l’ambiance », avant de se lancer sur les autres oeuvres proposées.

Meowton

Meowton, qu’on pourrait traduire par Miaouville, était un espace ludique réalisé par le collectif new-yorkais Babycastles, connu pour ses installations décalées. Cet environnement fait de voiture, château et prison en carton-pâte évoquait, à première vue, un terrain de jeu improvisé par des enfants. Véritable invitation à faire travailler notre imagination, le potentiel régressif de Meowton était hallucinant. On se retrouvait rapidement à simuler la conduite d’une voiture factice, bruit du moteur inclus, sans même s’en rendre compte. Ces différentes installations en carton, accueillant plusieurs jeux vidéo, étaient toutes directement inspirées de la manière dont jouent les chats. Babycastles est définitivement un collectif bien perché… Meowton apportait une fraicheur bienvenue au parcours de Joue le jeu.

A la périphérie de Meowton on pouvait tomber sur Ninja Shadow Warrior de Kaho Abe, une conceptrice new-yorkaise. Basé sur la reconnaissance de formes et de mouvements, le jeu vous propose d’incarner un ninja infiltré dans un palace assiégé. Via Kinect, le joueur doit se contorsionner pour prendre la forme des objets de l’environnement et ainsi se cacher derrière eux. L’intérêt du concept tient essentiellement dans la coopération puisqu’il était possible de joueur à plusieurs et ainsi se dissimuler derrière des objets spéciaux composés de la juxtaposition de plusieurs personnages. Ce gameplay assez fun rentrait très bien dans l’esprit frais de Meowton placé juste à côté.

D’une manière générale Joue le jeu a su interroger sa thématique sur de multiples plans, sans jamais tomber dans la facilité de l’approche divertissante, ni basculer vers la pure présentation d’oeuvres hermétiques d’art contemporain telles qu’on pourrait en trouver dans les musées spécialisés. Il s’agit là d’un équilibre rarement atteint par les évènements liés au jeu numérique. Si la cohérence générale des oeuvres entre-elles pouvait parfois faire défaut, l’hétéroclisme de la sélection était tel qu’il aurait été difficile d’aller plus loin… mais pas impossible.
 

Remerciement : Lynn Hughes
Photo : MLTD CHRL / Apostrophe

 

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