Breath of Saga
Critique VR
Another Fisherman’s Tale
Développeur
InnerspaceVR
Éditeur
Vertigo Games
Date de Sortie
11 mai 2023
Prix de lancement
19,99 €
Testé sur
PC en Air Link sur Quest 2
Il y a quatre ans et demi de cela, sortait A Fisherman’s Tale, un puzzle game largement récompensé. Aussi court qu’il soit, il avait su nous séduire par son originalité, autour d’un concept jouant sur les dimensions. C’est donc avec très grand plaisir que nous avons accueilli sa suite, Another Fisherman’s Tale, sortie le 11 mai 2023 sur PCVR, Quest 2 et PS VR2, aux éditions Vertigo Games (Arizona Sunshine, After the Fall, Unplugged). Dans celle-ci, InnerspaceVR (Maskmaker, Firebird – La Peri, Firebird – The Unfinished), toujours soutenu par ARTE, le CNC et la Région Île-de-France, cherche à nous offrir une aventure narrative encore plus poussée, tout en se réinventant. Un sacré challenge qu’il relève haut la main, si je puis dire.
La tête et les jambes
Comme dans le premier épisode, le jeu s’articule autour des maquettes construites par Bob pour raconter des histoires à sa fille Nina. Ainsi, après avoir été un pêcheur légendaire, puis un gardien de phare perdu dans la tempête, le voilà chasseur de trésors parti à la conquête de l’île légendaire de Libertalia, le pays de toutes les libertés. Mais tout ne se passe bien évidemment pas comme prévu et il s’échoue lamentablement sur un tas de rochers, son bateau en mille morceaux, tout comme son corps, éparpillé sur le sable. Il lui faut donc commencer par récupérer ses pieds avec une de ses mains qui se déplace en autonomie sur le bout des doigts, pour les ramener à son corps, puis y refixer sa tête et retrouver son autre main. Il ne lui reste alors plus qu’à chercher un moyen de se tirer d’ici. Et, c’est là qu’il tombe sur l’équipage de pirates du Bonne Mer et sa séduisante capitaine qui l’entraînent vers de nouvelles aventures.
Mais, il s’agit en fait des souvenirs que Nina a des contes de son père, en rangeant ses maquettes dans le garage de la maison familiale, alors que sa mère, qui se trouve à l’étage, perd peu à peu la tête. Et, c’est en passant de maquette en maquette qu’elle revivra l’épopée de Bob à la recherche de Libertalia et reconstruira peu à peu le passé de celui-ci, découvrant ainsi ce que cachaient les contes farfelus de ce grand rêveur qui cherchait à faire de ses histoires une réalité. La technique est efficace et appréciable pour nous plonger dans les doux rêves de Bob tout en restant connecté à la réalité, grâce à l’alternance des deux dimensions. On voit régulièrement d’ailleurs, en vivant les aventures de Bob, que l’on se trouve bien au fond du garage, au sein d’une de ses maquettes. C’est aussi l’occasion de faire divers clins d’œil sympathiques à ce que nous narrait le premier opus, lorsqu’il était encore pêcheur ou gardien de phare.
Un jeu à portée de main ?
Avec cette nouvelle itération d’A Fisherman’s Tale, InnespaceVR cherche donc à respecter l’esprit qui a fait le succès de son premier jeu autour de Bob, tout en adoptant une nouvelle approche. Ce n’est en effet plus en jouant avec les dimensions que l’on résout les puzzles, mais en exploitant les parties détachables de son corps. Lancer une main, que l’on contrôle ensuite à distance, permet ainsi de se faufiler un peu partout pour rapporter des choses, ouvrir des portes ou des tiroirs, manipuler des leviers… Il est également possible de catapulter sa tête pour avoir une autre vision et, par exemple, diriger plus facilement la main que l’on a projetée. On peut aussi déplacer son corps sans que la tête y soit fixée. Cela est cependant assez délicat à maîtriser, malheureusement, tout comme contrôler efficacement la main. C’est là le principal point négatif que l’on a relevé sur le titre. Ceci dit, en s’exerçant un peu, on arrive tout de même très vite à ses fins, et ce n’est donc pas véritablement handicapant.
Encore une fois, InnerspaceVR fait preuve de beaucoup de créativité dans sa proposition de gameplay. Non seulement il y a l’usage des mains et de la tête que l’on vient de citer et qui devront parfois être combinés (avec la tête d’un côté, le corps de l’autre et chaque main occupée à autre chose), mais on peut aussi obtenir des pinces coupantes de crabe, ou encore des crochets pour s’agripper et franchir certains passages. Il est même possible d’échanger ses pieds contre une queue de poisson afin de se déplacer plus librement sous l’eau, que ce soit à l’aide du stick des contrôleurs ou en se mouvant avec les mains. En milieu aquatique, d’ailleurs, ces dernières nagent dans les trois dimensions. Il y a aussi un moment où l’on se retrouve à l’envers et où les commandes sont alors inversées, ce qui complique quelque peu les choses, ou des manipulations à faire en utilisant les deux mains indépendamment. On peut enfin citer la possibilité de diriger des grues, comme les bras articulés d’un sous-marin pour se dégager le passage, ou encore naviguer avec le bateau entre les tentacules du Kraken. Ce ne sont pas les idées qui manquent et celles-ci sont efficacement mises en application.
Des pirates en kit
Au-delà de son gameplay, ce qui a fait le succès d’A Fisherman’s Tale était aussi son ambiance poétique et émouvante. Eh bien, on retrouve avec très grand plaisir celle-ci ici, avec de petites touches d’humour bienvenues et de nombreux jeux de mots autour des parties du corps. Le titre fait mouche, tout en nous offrant des graphismes, certes simples, mais séduisants. Et, pour couronner le tout, il est entièrement disponible en français, avec un doublage réussi. Le petit accent de Nina et de sa mère sont charmants. Même les chansons de marins qui nous accompagnent disposent de leur version française, ce qui est appréciable. Ceci est à noter, car, même s’il s’agit d’un studio français, ce n’est pas toujours le cas. Alors, bien sûr, Bob a tendance à se répéter si l’on ne fait pas vite ce qu’il veut, mais c’est pour nous donner un coup de main. Malgré les quelques petites contraintes de manipulations délicates et la comparaison difficile avec son aîné, Another Fisherman’s Tale a donc réussi son pari et nous a à nouveau conquis.
De plus, avec ses cinq chapitres et son épilogue, il s’avère un peu plus long que son prédécesseur. Comptez 4 à 5 heures, contre à peine deux pour A Fisherman’s Tale. C’est en tout cas clairement un jeu VR, pensé et conçu pour cela. Bien que totalement accessible, il offre la possibilité d’accéder à des indices, tout comme d’afficher les contrôles, afin de s’adresser au plus grand nombre. Vous pouvez d’ailleurs opter pour le mode confort, normal ou intense, suivant votre accoutumance à la VR. Dans le même esprit, vous avez la possibilité de vous déplacer librement ou de préférer la téléportation, avec rotation rapide ou continue et vignettage plus ou moins fort, de jouer en 180° ou 360°, assis ou debout, avec ou sans vibration des manettes. Il y en a pour tous les goûts. Seul hic technique à noter, si vous jouez sur Quest 2 en air link sur une version PCVR, le pass-through n’est pas très bien géré. Il peut faire planter le jeu ou vous faire perdre le son au retour. Rien de dramatique, il suffit de ne pas y recourir, mais c’est à savoir.
Tout en respectant son matériau de base, InnerspaceVR parvient, avec Another Fisherman’s Tale, à nous offrir une nouvelle proposition toujours aussi innovante et intelligente avec ses pantins de bois. Au lieu de jouer avec les dimensions, c’est désormais avec les parties de son corps que l’on relève les défis qui nous sont proposés. Bien que parfois délicat à contrôler, le titre se fait pardonner par sa créativité et l’ambiance prenante de la narration de ce nouveau conte émouvant autour de Bob. Ça reste assez court, mais c’est un peu plus consistant que le premier épisode et entièrement disponible en français. On en redemande.