Critique

Harmony : The Fall of Reverie

Nyam Hazz
Publié le 22 juillet 2023
Harmony : The Fall of Reverie

Développeur

Don't Nod

Éditeur

Don't Nod

Date de Sortie

8 juin 2023 (PC et Switch) et 22 juin 2023 (PS5 et Xbox Series)

Prix de lancement

24,99 €

Testé sur

PC

Bien que dévoilée au cours du Nintendo Direct du mois de février 2023, Harmony : The Fall of Reverie, la dernière production de Don’t Nod (Life is Strange, Vampyr, Tell Me Why, Twin Mirror), est disponible depuis le 8 juin sur Switch et PC, ainsi que sur consoles PS5 et Xbox Series depuis le 22 juin. À la fois développé et édité par le studio parisien, Harmony se présente bien évidemment comme une aventure narrative à embranchements. Mais contrairement aux autres titres de Don’t Nod, celui-ci prend la forme d’un visual novel où se croisent le monde réel et un monde mystique où l’on retrouve les aspirations de l’humanité.

Je rêvais d’un autre monde

Alors que Polly, de son vrai nom Polymnie Beauclair, a quitté son île natale d’Atina il y a maintenant de nombreuses années de cela, elle effectue un retour aux sources suite à la disparition de sa mère Ursula, une poétesse adulée dans l’ombre de laquelle elle vivait avant de s’enfuir. Elle retrouve ainsi le quartier historique d’Alma à l’identique, à quelques différences près. La mégacorporation Mono Konzern (MK) qui fait vire l’île a en effet accru son influence et son contrôle. Elle surveille désormais tout et tout le monde, notamment grâce à ses drones, ce qui déplait clairement à certains. Construite sur les ruines de l’ancienne civilisation oxione, la ville est devenue la plus avancée d’Europe méridionale au niveau technologique. En rentrant aux Naïades, une ancienne piscine publique réhabilitée par sa mère et où de nombreux créatifs venaient autrefois se réfugier, elle retrouve sa sœur adoptive Nora, la petite-fille du compagnon d’Ursula.

Ensemble, elles vont enquêter sur la disparition de cette dernière et découvrir bien vite que ce n’est pas la seule. En parallèle, grâce à un collier trouvé dans la chambre de sa mère, Polly va être happée dans une autre dimension du nom de Rêverie. Là, se trouvent des êtres immortels représentant les aspirations de l’humanité : Félicité, Pouvoir, Lien, Chaos, Vérité et Gloire. Mais ce monde est en danger et dépend de Fatal, le monde réel, pour exister. Et vice versa. Fatal a besoin des rêves auxquels Rêverie donne vie pour garder espoir, alors que Rêverie a besoin que son cœur soit alimenté par les rêves de l’humanité. Polly, que l’on appelle ici Harmonie, est l’oracle chargé de restaurer l’équilibre entre les deux univers et sauver l’un comme l’autre, notamment grâce à son pouvoir de clairvoyance lui permettant de visualiser les différents futurs possibles. Mais il y a-t-il un lien entre le déséquilibre observé à Rêverie, l’emprise de MK sur Atina et la disparition d’Ursula ?

Jazz Harmony

Le cœur du gameplay réside donc dans la possibilité de visualiser l’avenir et de choisir quelle direction prendre en conséquence. Cela passe par un arbre à embranchements appelé la Mantique. La visibilité est toutefois limitée et qui plus est très vague en informations. Au mieux, cela permet d’avoir une idée vers quoi on veut tendre, nous incitant ainsi à passer par certains nœuds narratifs afin de récolter les cristaux liés à une aspiration donnée, afin de pouvoir débloquer le nœud visé. Cela limite donc les possibilités, sachant qu’accéder à une branche peut condamner définitivement les autres, et que certains nœuds font aussi perdre des cristaux. Et tout un pan du futur est parfois masqué, les nœuds n’étant dévoilés qu’une fois atteint un certain point. Des nœuds sont aussi bloqués et demandent d’en visiter d’autres avant, voire plusieurs. Enfin, certains sont inévitables. Le concept est donc intéressant mais sa mise en application parfois frustrante car réduisant notre libre arbitre.

Quoi qu’il en soit, différentes voies sont envisageables, chacune révélant différentes informations, ce qui milite très clairement pour la rejouabilité et si le titre peut être bouclé en 8 heures si l’on ne traîne pas, ce sera bien plus important si l’on veut explorer toutes les possibilités et tout découvrir. Le scénario se découpe en 5 actes découpés en plusieurs chapitres (généralement 3), et si l’on peut influer sur l’avenir sans pouvoir modifier le passé, il est cependant possible de recommencer un chapitre au début tant qu’il n’est pas achevé, ce qui donne l’opportunité de s’essayer à différentes choses sans forcément refaire l’intégralité du jeu, ou de changer de décision en cas de regret. Les choix ne sont en effet pas toujours faciles, chacun pouvant influencer le scénario à la fois de manière positive et négative. Quant aux dénouements de fin d’acte, leurs conséquences sont encore plus importantes que celles des nœuds.

La vérité au cœur du chaos

Avec sa direction artistique dessinée à la main et surtout son style orienté vers le roman graphique, même s’il y a quelques cinématiques sympathiques, Harmony se distingue des autres productions de Don’t Nod. Il faut ainsi se contenter de quelques fonds représentant les différents lieux du jeu, avec quelques animations, et le portrait de deux personnages en premier plan qui échangent entre eux, toujours avec les mêmes expressions et la même gestuelle. Personnellement, je n’ai rien contre le style, mais cela peut dérouter ceux qui ne sont pas coutumiers du fait. C’est davantage sur le déplacement entre les nœuds de la Mantique que j’aurais à redire. Cela n’est pas toujours très facile avec une manette, mieux vaut alors recourir au combo clavier-souris. Pour le reste, aucun problème technique à signaler, du moins sur PC, si ce n’est les chargements à répétition à chaque fois que l’on passe de la Mantique à l’histoire. Cela se répète en effet sans cesse, parfois avec des séquences vraiment très brèves, ce qui casse un peu le rythme, dommage.

Le scénario a beau être étrange et très mystique, il n’en est pas moins intéressant et si tout est retranscrit de manière textuelle en français, le titre dispose d’un doublage en anglais tout à fait satisfaisant, bien que l’animation labiale soit malheureusement parfois décalée. Et l’ambiance sonore, tout en douceur, vient efficacement appuyer le déroulé de l’histoire empreinte de sentiments, comme la difficulté du deuil par exemple. Certains reconnaîtront sans doute les compositions de Lena Raine (Celeste). Les graphismes, bien que limités à quelques esquisses, sont également fort séduisants, notamment les personnages, tous dotés d’une personnalité bien marquée. Enfin, nous terminerons par la volonté d’utiliser une écriture inclusive. On retrouve ainsi des termes comme iels, toustes, les copaines, elleux… Il faut prendre le temps de s’y accoutumer quand on n’a pas l’habitude. Cela n’empêche toutefois pas la présence de personnages bien genrés pour lesquels le féminin ou le masculin sont systématiquement employés, mais d’autres ne le sont pas, à l’image de Vérité, clairement androgyne.

En optant pour un style visual novel, tout en restant dans le domaine de l’aventure narrative à embranchements, Don’t Nod a pris un certain risque. Avec son scénario original, ses graphismes chatoyants et son efficace bande-son, il s’en sort toutefois relativement bien, même si le rythme est trop haché du fait du gameplay, que le déplacement dans l’arbre narratif n’est pas toujours aisé à la manette et qu’atteindre les objectifs visés impose les choix précédents, ce qui limite malheureusement la liberté d’action. Le concept de choix difficiles à opérer demeure cependant et le titre offre ainsi une rejouabilité certaine si l’on veut bien tout explorer.

Indika

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