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The Legend of Zelda :
Tears of the Kingdom

Howler
Publié le 1 août 2023

Développeur

Nintendo

Éditeur

Nintendo

Date de Sortie

12 mai 2023

Prix de lancement

69,99€

Testé sur

Nintendo Switch

Est-ce que la hype est passée ? Non parce que je sors enfin la tête de ma grotte, et tel l’ours en fin d’hibernation, je me rends compte que ce clignement d’œil s’est avéré être un bond dans le temps de 150h dans le monde d’Hyrule. The Legend of Zelda : Tears of the Kingdom (ce nom est bien trop long, on va raccourcir par TotK) est sorti il y a deux mois déjà et j’ai eu besoin de temps pour le finir (pas merci mon TDA d’ailleurs) mais surtout, pour organiser mes idées, parce que le dernier bébé de Eiji Aonuma est dense, très dense.

T'es plutôt Ganon, toi !

Vous connaissez la rengaine maintenant, il est sûrement trop tard pour vous dire si oui ou non le jeu est bien. Les (très bonnes) critiques lors de la levée de la NDA ont évidemment foisonné, le jeu se vend comme des bouteilles d’eau dans le Sahara et vous n’êtes probablement là que pour avoir mon ressenti. Évidemment, l’une des choses que l’on peut avant tout questionner, c’est la légitimité de cette suite, notamment dans une licence comme celle-ci, qui a plutôt tendance à multiplier les histoires sans liens directs, en utilisant la même base : son héros de légende. Ici, on reprend le même monde que BotW, la même mythologie en place, les mêmes personnages et… on ne recommence pas vraiment. À vrai dire, plus je jouais à TotK et plus je me disais que cet épisode n’aurait jamais pu voir le jour sans BotW, que beaucoup de personnes voient comme « une démo avant le vrai jeu ».

Je ne suis pas trop d’accord avec l’affirmation précédente. BotW était une réappropriation de son genre et la forme ultime de la licence telle qu’elle a été pensée par Shigeru Miyamoto, il y a 30 ans, mais c’est aussi une préquelle qui va au-delà de son histoire. Sans toutes les informations, l’univers et les mécaniques introduites par BotW, les joueurs se seraient confrontés à une surcharge cérébrale évidente et peu accueillante. Il fallait préparer le terrain et libérer du temps de cerveau en rendant l’exploration du monde routinière. Grâce à ça, la mémoire musculaire se charge de piloter et peut laisser plus d’espace pour se creuser la soupière, afin de construire des structures pratiques pour évoluer (et pourtant, le jeu nous attaque d’une migraine laser après avoir fait le tour de toutes les nouveautés et nouveaux environnements). Quid de ceux qui démarrent avec cet épisode ? Si vous avez réussi à absorber toutes les mécaniques sans faire un burnout, félicitations ! Pour les autres, ça va demander un peu d’heures supplémentaires (ou un tour de repêchage avec BotW). Mais, bien entendu, la formule peut ne pas vous plaire, c’est OK et ça se comprend, vu la direction prise par ce nouvel épisode.

IMMERSIVE LINK

Si on m’avait dit un jour que j’aurais de l’Immersive Sim dans mon Zelda, je pense que j’aurais un peu rigolé avant de dissoudre l’Assemblée Nationale. Pourtant, c’est bien ce qui se profilait avec l’opus de 2017 et tous ses systèmes qui interagissaient entre eux pour proposer des solutions parfois saugrenues afin d’appréhender une situation ou résoudre une énigme. Dans TotK, cet effet est démultiplié par la présence de la construction. J’aimerais atteindre cette falaise mais je n’ai pas assez d’endurance ? Pas de souci, je vais empiler les troncs d’arbre pour me faire un giga pont. Le désert n’est pas franchissable sans rester à l’ombre ? Je vais me construire une cabane sur roues pour pouvoir avancer continuellement à l’abri du soleil. Ces deux options, elles font partie d’une multitude de solutions que le jeu va vous suggérer au travers de ses différents artéfacts Soneaus. Voler, planer, se propulser, foncer, attaquer… tout un tas d’actions en verbes du 1er groupe qui pourront être réalisées avec juste 3 ou 4 objets et un peu de colle verdâtre. Ceci donne évidemment lieu à des moments parfois géniaux, parfois complètement cons (voir la vidéo ci-contre).

Maintenant que les joueurs en manque de créativité sont conquis, Aonuma s’est aussi attaqué à ses détracteurs vis-à-vis des armes qui se brisent. Il vous voit les grincheux, à vouloir une arme tout le long de leurs jeux sans jamais essayer le reste et cette fois, il vous a bien piégé avec l’Amalgame. Rien à voir avec une quelconque pratique d’extrême droite, mais une fantastique pirouette qui résout le problème des armes qui se cassent et la récupération outrancière de parties de monstres. Désormais, pour avoir une arme efficace, il ne faudra plus la trouver, mais simplement la créer avec tout ce que vous avez à portée de main. Un joli « une pierre, deux coups » qui devrait convaincre les déçus du précédent opus.

Voici un extrait qui permet de témoigner de mon absolue bêtise en termes d’ingénierie.

Une fois mes bonnes 150 heures passées à parcourir le monde, catapulter des korogus et aligner mes phalanges sur le pif du grand Ganondorf (le vrai cette fois, pas une projection), je me suis fait une première réflexion devant l’ultime cinématique : et si c’était la fin ? Pas la fin de la série, ce serait s’asseoir sur un bon gros paquet de fric, mais la fin de la licence telle qu’on la connait depuis novembre 1998. La série doit évoluer, passer le cap et oublier ses anciennes traditions. Ça se ressent énormément au niveau de la narration, bien plus présente et centrée autour de Zelda, rappelant au passage que c’est son nom sur la pochette et que Link n’est que le bras armé de la royauté d’Hyrule, censé faire le lien (vous l’avez ?) avec le peuple. L’Immersive Sim basée sur Banjo & Kazooie : Nuts & Bolt n’est clairement pas la suite logique qu’on aurait imaginée, surtout quand on voit le jeu de questions-réponses qu’ont fait Nintendo et From Software sur cette formule d’action-RPG, mais il se trouve que ça lui colle magnifiquement bien à la peau.

Le contre coup de ce changement, c’est une perte notable sur le sentiment de solitude, cette façon que BotW avait de nous immerger dans un monde dont on devait découvrir les coutures sans compter sur autre chose qu’une discussion au détour d’un feu de camp ou au relais du coin, c’était tout de même un sacré tour de force. Dans TotK, les PNJ sont bien plus présents, ce qui s’explique sans problème au vu du scénario et de la volonté de nous faire participer directement au combat contre le mal, et pas juste de venger un passé lointain. Cependant, il exile totalement cet effet très « Fumito Ueda » que j’aime tant, où un cheval et le soleil sont nos principaux compagnons de route. Mais, si je refuse de parler de TotK comme d’une version 1.5 de BotW, c’est avant tout parce que leurs similitudes n’en font pas des jeux avec une philosophie similaire. BotW veut qu’on explore le monde, TotK veut qu’on s’amuse avec le monde. C’est un parallèle qu’on peut facilement faire avec la série des Yakuza, dont tous les épisodes se passent dans Kamurochō, une ville fictive qui a évolué à travers le temps, mais dont les directions de game design prisent entre Yakuza 6 et 7 sont largement différentes (et on peut en rajouter une couche avec Judgement). Il existe tout un tas d’exemples semblables dans le paysage vidéoludique et Zelda ne fait pas exception, il a juste le malheur d’être son représentant le plus populaire.

À l’heure où j’écris cette conclusion, il s’est espacé un mois entre la première lettre saisie sur mon clavier et ce point final, et rarement un jeu ne m’aura autant donné du fil à retordre pour mettre des mots pertinents sur des sentiments de jeu. Zelda est un sujet de discorde récurrent, et nul doute que Tears of the Kingdom va faire couler de l’encre pendant plusieurs années encore, au même titre que son aîné. Mais, n’est-ce pas là la marque de toutes les grandes œuvres de ce monde ? Est-ce qu’un jeu avec des partis pris forts, qui n’hésite pas à se mettre sa fan base à dos pour aller dans une direction qui lui plait (et en le faisant bien), n’est pas tout ce que l’on demande depuis que le cahier des charges et le formalisme sont devenus des récurrences dans ce médium ? J’aime à croire que oui, et par cette conclusion, je n’hésite plus à l’affirmer : Zelda Tears of the Kingdom est un grand jeu, une suite parfaitement maitrisée et Aonuma continue de révolutionner la licence. Après, libre à vous d’être en accord ou pas avec cette nouvelle vision.

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