Critique

Destiny 2 – Au-delà de la lumière

Développeur / Éditeur : Bungie – Date de Sortie : 10 novembre 2020
Prix : 60 € (en fonction de la version)

Nouveau scénario, nouveau cap, nouvelles idées, nouveau pouvoir. Beaucoup de nouveauté dans cette extension d’un jeu sauvé des profondeurs éditoriales qui ne cesse d’étonner par sa capacité à happer le cœur (et le temps) des joueurs depuis sa sortie en Free to Play il y a un an. Saison après saison, une nouvelle bible scénaristique est venue redonner des couleurs à un univers beaucoup trop vite lancé sur le marché.

Activi-qui ?

Depuis des années, les joueurs les plus fidèles attendaient la venue des Ténèbres pour contrer la lumière des gardiens de ce monde toujours très mélancolique. Cette fois ça y est, Destiny 2 veut raconter quelque chose de plus concret que de petites histoires dans la grande histoire. Mais disons-le clairement : ce que raconte cette campagne n’est qu’une pierre à l’édifice que seront les Saisons à venir.

Si vous ne connaissez pas l’histoire de Destiny, bonne nouvelle, pendant longtemps il en a été de même pour la plupart des développeurs. Activision derrière le dos, les autrices et auteurs de la saga ont toujours dû rendre une copie plus chiffonnée et bidouillée que la vraie, cachant leurs réelles intentions épiques dans les pages des livres virtuels à débloquer au fil des aventures et du farm. Ce FPS « Jeu Service » (que je m’amuse depuis quelque temps à vous résumer pour que vous vous y retrouviez) a cette volonté de vous emporter dans l’histoire depuis que Bungie a retrouvé sa liberté. Depuis un an, le jeu est Free to Play, ne demandant qu’une dizaine d’euros tous les trois mois pour prolonger l’aventure en achetant des « Saisons », du contenu en temps réel faisant progresser le scénario et ajoutant des activités de jeu. À côté de ça, il faut claquer 60 € pour chaque extension. On parle de Beyond Light aujourd’hui, mais nous en verrons une autre en 2021 et la fin de l’histoire, le dénouement final, débarquera en 2022. Le jeu service à son paroxysme, désormais sûrement digne des qualités chronophages et épiques d’un Warframe. Ces deux jeux étant les piliers (les seuls ?) du jeu service fonctionnel et réussi.

Mais parlons de Beyond Light, le petit nom anglais de ce « Au-delà de la Lumière » très joliment traduit mais qui nous prend davantage de caractères à mettre en page. Soyons clair : ce n’est pas Destiny 3. C’est un renouveau de direction pour Bungie, un renouveau d’accueil pour les fans, mais ce n’est pas un nouveau jeu ni même un chamboulement total.

Si vous venez d'arriver...

Une grosse boule blanche au-dessus des hommes se dresse comme un dieu de la lumière, offrant une longue vie et des pouvoirs aux élus nommés Gardiens, les joueurs. Ceux qu’on appelle les déchus, une race d’aliens nommés en vérité les Eliksni, est en proie au pire fanatisme depuis que cette grosse boule les a quittés sans prévenir, détruisant leur monde. En parallèle, les Ténèbres sous forme de pyramides sombres viennent de débarquer dans notre système solaire. C’est la panique mais plus encore ces ténèbres ont donné leur pouvoir, la « Stase », à une cheffe Déchue dictée par la jalousie et la vengeance. Vous allez devoir l’arrêter et pour ça… Utiliser le pouvoir des ténèbres ?

Mais cette histoire en tant que débutant, vous vous en fichez un peu. Car ce Beyond Light reprend ce qu’il manquait furieusement au jeu depuis sa sortie : une introduction. Se déroulant en Ancienne Russie, dans la zone du Cosmodrome, l’introduction se déroule sur quatre bonnes heures de jeu reprenant toute l’introduction de Destiny 1er du nom mais lui ajoutant un personnage principal qui accentuera l’épopée. Tout y passera : les principes de farm, les missions, les évènements, les assauts, de façon à ce que tout soit clair pour tout le monde. On a envie de dire : enfin.

Cela ne rendra pas l’histoire plus facile à comprendre pour vous car le jeu ne propose toujours pas de résumé de toutes les anciennes histoires. Mais au moins, vous pourrez y mettre les pieds en ayant une idée d’où vous rendre et de comment cela marche sans être obligé de devoir écouter un.e pote lourdingue qui vous explique pourquoi le Gambit est le meilleur moyen de farmer et que la Saison des Éternels était quand même la meilleure. Là au moins, c’est clair.

Précisons tout de même que le meilleur moyen de commencer et de ne rien payer et de lancer le jeu en version gratuite. Vous aurez quand même votre introduction et aurez tout loisir de découvrir le gameplay et les différentes destinations ensuite. Prenez le temps d’adhérer et de savoir si vous accrochez au jeu. Mais sachez qu’il ne vous fera toujours pas de cadeau en ce qui concerne la compréhension de son large et passionnant univers mis en place depuis le premier volet.

Inutile de vous faire l’affront de partir dans une explication de gameplay, il aurait fallu refaire le test du jeu original pour cela. Mais Destiny 2 c’est un Shooter/Looter. Vous tirez en vue FPS, donnez des coups d’épées à la troisième personne, tentez de récupérer du loot plus puissant encore pour devenir un gardien d’exception. Un nouveau cap de niveau est amené avec cette extension et il vous faudra dix bonnes heures pour l’atteindre en toute tranquillité si vous vous équipez de tout ce qui tombe de plus élevé, quelles que soient les compétences. La refonte d’un système de mods à placer sur votre équipement vous proposera par contre quelques heures supplémentaires d’optimisation bienvenue à répartir entre votre agilité, votre résistance aux coups, votre santé et surtout l’utilisation de vos pouvoirs.

Si vous y jouez déjà

Pour vous, le jeu va commencer directement sur Europe, la nouvelle planète à visiter. Et vous allez en prendre plein les yeux et les oreilles. Les nouvelles compositions de Michael Salvatori, Skye Lewin, Rotem Moav, Josh Mosser, et Michael Sechrist sont fantastiques, emprunts d’une mélancolie folle qui rend les panoramas glacés de Europe profonds de sens. L’histoire s’emporte et vous transporte facilement, via des cinématiques toujours réussies mais moins nombreuses qu’à l’accoutumée. L’idée est de vous faire profiter du paysage et des nouveaux pouvoirs en finesse et au fil d’un récit très bien conçu, laissant la place à des personnages hauts en couleurs.

Si jamais vous avez déja lancé le jeu mais n’avez rien compris et n’avais pas tenté de persister : refaites un personnage, sinon il vous faudra un guide juste pour aller chercher la quêtes d’introduction nouvellement ajoutée. Bon, je taquine un peu mais elle se situe dans un nouveau terminal de la tour dédié aux anciennes quêtes et ceci n’a rien de logique pour un nouveau joueur.

Évidemment que je ne vais pas spoiler mais une chose est importante à dire : c’est l’histoire des déchus, pas celle des Ténèbres. Pour elles, il y aura les saisons et les deux ans d’extensions à venir. Si vous aimez le Lore, vous aimerez cette histoire à l’ennemi pas si manichéen lorsqu’on connait son passé, ses valeurs et la raison de sa jalousie. Vous redécouvrirez de vieilles connaissances dans des conditions idéales pour jouer les Prologues d’une bataille entre la Lumière et les Ténèbres qui va faire rage. Mais disons-le franchement : Beyond Light raconte une moyenne histoire de la grande histoire. C’est un chapitre important de l’univers, qui répond et étend plein de questions laissées sans réponse par le désastre Activision, mais atteindre la fin du scénario principal ne vous éblouira pas. Cela va vous distraire, vous amuser, mettre en avant des personnages avec efficacité, mais ce n’est pas le scénario d’un Destiny 3 tant attendu. C’est dans la lignée d’un Forsaken pour son intérêt et d’un Bastion des Ombres pour sa construction. Un gros morceau narratif avec cinématiques (6 heures de jeu environ) sera suivi d’une poignée de quêtes faisant progresser l’histoire « d’après Beyond Light ». Comptez sur une vingtaine de bonnes heures pour vraiment tout voir et tout débloquer de ce que Beyond Light raconte. Sauf si vous avez prévu de fouiller Europe de fond en comble au quel cas, ne comptez plus.

Le vrai scénario passionnant qui se trame en fond, expliquant l’arrivée des Ténèbres, la suppression de quatre planètes et le destin de leurs personnages auparavant souvent visités, se retrouvera pour l’instant dans les chapitres des livres de lore à débloquer au fil du voyage et dans les quêtes qui servent d’épilogue à cette aventure. En attendant la Saison de la Traque à venir dans une quinzaine de jours…

Petit lifting

Des menus améliorés sont au rendez-vous, rangeant de façon bien plus agréable et efficace les nombreux livres à lire et les triomphes (sortes de Succès/Trophées à débloquer). On a le droit aussi à des véhicules qui s’activent en temps réel et ne demandent plus la bonne modification d’inventaire pour cela : c’est un vrai plus pour ceux ayant parcouru les terres de Destiny depuis le début. Autre bonne idée : votre spectre (la petite boule qui parle et vous suit partout pour ceux qui débarquent) peut désormais être améliorée et embarquer des modifications vous permettant de moduler les récompenses qu’elle amène : de l’XP, de l’argent, un radar de ressources ou d’autres fioritures de farm agréables seront là pour vous permettre d’obtenir un spectre par façon de jouer ou mode de jeu. C’est très bien pensé et malin.

Côté pouvoirs, on a donc une nouvelle doctrine : la « Stase ». Il va falloir attendre quelques jours avant de voir ce qu’il en est mais elle est déjà visuellement très réussie. Permettant de créer des murs de glace explosant et faisant des dégâts aux ennemis à la moindre petite écharde gelée entrant en collision avec eux, cette Stase a aussi de véritables bonnes idées de coups spéciaux pour chacune des trois classes du jeu. Le chasseur est (pour une fois ?) un peu stratégique et joue la carte des dégâts de Zone avec sa tornade et son gel d’ennemi sur place, pendant que le Titan continue de toute défoncer au sol. Enfin, l’Arcaniste prend le temps de geler les ennemis et de claquer des doigts pour tout faire imploser. On peut moduler tout cela par la suite, à haut niveau de scénario, pour se permettre d’obtenir une doctrine plus en lien avec notre façon de jouer. Mais même à son niveau le plus simple, celle-ci est très amusante et efficace sur le terrain. Difficile de revenir sur les anciennes après sa découverte. Maintenant, on a quand même de gros doutes sur ce qu’elle apporte aux modes multijoueurs et compétitifs. Clairement, cela risque d’être un beau foutoir.

Enfin, il faut revenir sur les deux nouvelles destinations proposées pour continuer à chanter les louanges d’une Europe majestueuse de beauté, qui dénote beaucoup avec le Cosmodrome. Cette seconde zone, celle de la nouvelle mission d’introduction pour les nouveaux venus, est l’exacte copie du même Cosmodrome de Destiny premier du nom… Et c’est dommage. Malgré deux trois secteurs oubliés (des zones en couloirs, d’ennemis et de boss, proposant une récompense en fin de course) qui sortent du lot, ce Cosmodrome n’a rien à offrir d’autre qu’un gros tutoriel sur un large espace vide et c’est un peu décevant. On espère vraiment que les développeurs ont prévu de se servir de cet endroit plutôt ennuyant et rébarbatif pour lui ajouter quelques missions de qualité dans le futur. Enfin, on va chipoter un peu mais cela a son intérêt : Europe est belle et passionnante, mais aussi remplie de zones vides et de murs invisibles. C’est ce genre de détails qui nous rappellent que Destiny 2 est, à la base, un jeu de 2017.

Beyond Light nous refait le coup des extensions Forsaken et Shadowkeep : c’est une petite histoire dans la grande histoire. À ceci prêt que cette fois, la grande histoire est bien présente au fil des saisons et des événements réguliers. Au-delà d’un Destiny 3, d’un renouveau ou d’une quelconque lubie de fans qui espèrent toujours que la franchise Destiny se relève une bonne fois pour toutes de ses années d’errance, Beyond Light est un ralliement au drapeau prévenant tous les joueurs connectés que l’équipe est en place et que le show peut enfin commencer. Ceux qui aiment, aimeront. Ceux qui débarquent devront toujours s’accrocher, mais ce sera définitivement plus simple de s’y retrouver. En même temps, ça ne pouvait pas être plus compliqué. Maintenant, il ne reste plus qu’à apprendre des réussites et des erreurs des Saisons payantes de 2019/2020 pour faire de ce Destiny désormais officiellement bien relancé le jeu service de qualité qu’il a toujours voulu être.

Skywilly

Skywilly

Rédacteur en chef collectionneur de Skylanders et qui passe beaucoup trop de temps sur ces briques Lego. Heureusement qu'il y a des petits jeux pour s'évader ! Auteur de Le jeu vidéo indépendant en 2015 : Portraits de créateurs

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