Il était une fois la Playstation. Première console de Sony, elle fut également une des premières consoles à proposer ses titres sur cd-rom. Outre la quantité de mémoire supérieure de ce format sur celle des traditionnelles cartouches, ce fut aussi le support pour des musiques de meilleure qualité sonore. Parmi les perles que comptera la machine, PaRappa The Rapper est sans conteste un de ses ovnis les plus inoubliables. Entre ses rythmiques de hip-hop et un style graphique original et assumé, il avait su nous apporter un beat de fraîcheur dans nos vies de joueurs. Parce-que cela semble être devenue la norme, ce jeu assurément culte a droit au jour d’aujourd’hui à se propre version remastérisée dans les règles de l’art.
I Gotta Believe
Si PaRappa The Rapper tient une place importante dans l’histoire de la Playstation, et plus généralement dans le jeu vidéo, c’est qu’il s’est imposé comme le précurseur d’un genre devenu très vite populaire, mais dans un premier temps uniquement au Japon. Ce n’est qu’à sa suite que d’autres monstres du jeu de rythme musical ont fini par émerger, tel les Beatmania, le très célèbre Dance Dance Revolution ou encore Guitar Freaks. Et ce bien avant que l’occident ne s’embarque dans cette aventure musicale avec ses Guitar Hero et autres Rock Band. A la différence de la majeure partie de ces titres, il ne nécessite aucun accessoire sous forme d’instruments de musique. Il était entièrement jouable à la manette et n’utilisait que les quatre boutons de façade, les fameux croix, carré, rond et triangle.
Malgré une durée de vie potentiellement courte – le jeu ne comptant que six stages durant chacun approximativement le temps d’une chanson – il était impressionnant pour la qualité de son ensemble. Il faut se rappeler qu’à sa sortie, les jeux de rythme étaient quelque chose d’inédit. Il faudra attendre un petit peu pour que les autres ténors japonais du genre se décide à venir sur console après avoir conquis avec succès les salles d’arcade. PaRappa avait donc la place libre pour se montrer. Entièrement nouveau dans le paysage, il ne s’est donc pas contenté d’être novateur. Il était aussi beau à sa manière.
Son identité visuelle était notamment intéressante, en mélangeant la troisième et la seconde dimension. Bien que les décors fussent principalement en 3D, les différents personnages de son histoire – car il y en a une – apparaissaient sous la forme d’entités plates en deux dimensions, comme découpées dans un magazine. Son esthétique était faite de couleurs vives rappelant le Street Art en général, à laquelle la participation de l’artiste américain Rodney Greenbalt ne fut sans doute pas étrangère.
L’univers imaginé par le développeur nippon NanaOn-Sha est complètement déjanté à la manière des Looney Tunes, voire des Tiny Toons pour les amateurs de bonnes références télévisuelles. PaRappa n’est pas seulement un apprenti rappeur, mais également un ado, et son histoire est celle d’un jeune clébard qui ne désire qu’une seule chose, et c’est de gagner le coeur de Sunny Funny, la belle fleur au sens propre comme figuré qui hante ses pensées. Bref, tout cela n’est que prétexte pour lui faire passer différents stages comme autant de passages formateurs pour lui, allant de l’apprentissage des arts martiaux avec un maître à tête d’oignon, à des cours de cuisines littéralement avec un poulette sachant casser des œufs (les siens?), en passant par des cours de conduite ou l’enseignement de l’économie des marchés aux puces. Toujours en étant accompagné d’un bon rap, forcément.
CHOP ! KICK ! PUNCH !
Comme il s’agit donc de musiques hip-hop, l’accent n’est pas spécialement mis sur une bonne appréciation de la mélodie qui sert avant tout d’accompagnement, l’importance est plutôt portée sur les mots. A l’écran, c’est sous la forme d’une ligne sur laquelle des touches de la manette apparaîtront vous indiquant quoi appuyer quand le curseur de PaRappa passera au-dessus. Mais avant, vous aurez l’occasion d’admirer votre maître de stage vous montrer la voie à suivre. De niveau en niveau, la difficulté sera certes progressive, mais tout de même de plus en plus élevée, en sachant qu’une évaluation de votre performance en BAD (mauvais) ou AWFUL (affreux) vous obligera à repasser l’épreuve depuis le début. Obtenir GOOD (bon), voire mieux avec COOL, vous garantira le passage à la suite des événements. Je me rappelle qu’à l’époque, à terme d’entraînement, j’avais compris une chose : il faut pour réussir au mieux ce défi se caler sur la rythmique créée par les mots. Il est alors parfaitement possible d’enchaîner les touches sans presque faire attention au fameux curseur, pourtant indicateur de quand appuyer sur les touches voulues.
PaRappa peut paraître injuste surtout après les trois premiers niveaux bien plus accessible. A-t-il vieilli aujourd’hui ? D’un côté oui et de l’autre non. Son esthétique fait toujours mouche, même si le côté presque trop propre de ce remaster en full hd ou 4K avec de l’anti-aliasing a tendance à faire ressortir la simplicité de ses graphismes. Ce remaster est d’ailleurs plutôt simple. Il s’agit ni plus ni moins d’une transposition en haute résolution du jeu d’origine sans fioritures excessives. Le jeu reste le même si ce n’est l’utilisation assez gadget des vibrations de la manette pour vous donner des indications sur quand appuyer sur les touches pour respecter le flow de la musique. Les musiques d’ailleurs, parlons-en. De ce côté, la bande son fait toujours son office. C’est peut-être la nostalgie qui parle, mais ce rap tapant dans le funk ou parfois les influences reggae selon le niveau, fonctionnent toujours à merveille. Les mots coulent comme du miel au rythme de mélodie entraînantes. Les séquences cinématiques sont par contre d’origine et piquent un peu les yeux.
Il reste alors un jeu peut-être un peu maigre de nos jours, surtout après des Guitar Hero ou Dance Dance Revolution au contenu bien plus riche. Vous n’y trouverez en effet aucun mode multijoueurs et rien de plus que six stages à pratiquer en solitaire. Ce remaster fait le minimum syndical pour redonner une jeunesse à ce titre culte, mais il le fait tout de même bien. La nostalgie, encore elle, jouera un rôle essentielle je pense dans votre envie d’y rejouer. Si vous étiez fan de ce clebs rappeur au grand cœur, je ne saurai que trop vous conseiller de lui laisser une place dans le votre au cas où vous n’auriez plus votre copie du jeu sur la première Playstation. Pour les autres à qui ce jeu leur serait inconnu, je ne saurai que vous dire de lui laisser sa chance au nom de votre culture vidéo-ludique et surtout si vous êtes vraiment fan des jeux rythmiques, en faisant peser dans la balance tout ce que je viens de vous dire.
PaRappa The Rapper Remastered est un must-have dans toute ludothèque qui se respecte. Mais est-ce suffisant pour justifier un tel achat ? La nostalgie jouera forcément un rôle important dans l’intérêt de l’acquérir. Il faut dire qu’il s’agit d’une copie identique jusque dans les menus. L’antialiasing et une résolution bien plus haute font tout de même bien plaisir à voir pour lui redonner une seconde jeunesse. Il est peut-être moins indispensable qu’à l’époque bénie de la PSOne, mais il reste malgré tout un ovni aux rythmiques hip-hop qui vaut le détour, ne serait-ce que par curiosité.